Le jeune maraicher bio a la force de ses convictions. Au Puy-Sainte-Réparade (13), elles lui ont permis de fédérer et de créer un véritable écosystème pour une agriculture locale et bio dans la commune. Une aventure plus que méritoire… et ce n’est pas fini.
Tristan et son épouse Oriane sont passés pour de doux rêveurs lorsqu’ils se sont installés en maraichage bio en 2007. En effet, l’agriculture n’était pas leur métier : Oriane était psychologue du travail et Tristan travaillait dans la restauration. Pourtant ils sont rapidement plébiscités par les consommateurs pour la qualité de leur production et leur engagement en faveur du bio et du local.
« En 2007 nous avons commencé avec 1 hectare. J’allais me poster aux endroits stratégiques en pleine saison avec mon tracteur et ma remorque, c’est comme ça que nous nous sommes fait connaitre » nous raconte Tristan Arlaud. Aujourd’hui ils disposent de 25 hectares à exploiter et vendent en direct dans leur magasin à la ferme, la joliment nommée Les Jardins de Paradis.
Circuits courts et agriculture bio
Convaincus par les circuits courts, ils ont toujours privilégié la vente locale. Mais le véritable virage est pris en 2014 quand ils signent avec une dizaine d’autres agriculteurs locaux (maraichers, volaillers) et une cinquantaine de clients fidèles les statuts de l’Association de Développement de l’Agriculture du Puy-Sainte- Réparade (ADAPSR).
« Pour faire ce que les politiques ne faisaient pas. A savoir organiser les circuits courts et privilégier l’agriculture bio », souligne Tristan. Ils commencent alors à co-construire un Projet Alimentaire Territorial (PAT) qui ne portait pas encore ce nom (voir encadré ci-dessous).
Quand ils demandent à leurs clients ce qu’ils souhaitent pour l’agriculture de la commune, « la réponse quasi unanime était : développer la vente directe et que vous vous attaquiez à la restauration collective » indique Tristan.
Conforter l’agriculture locale et citoyenne
Tristan s’attèle alors avec les producteurs de l’ADAPSR à organiser l’offre pour leurs clients. Ils créent une « plateforme paysanne ». Elle permet de mutualiser les productions sur un même lieu et de proposer à la ferme un magasin cohérent en quantité et en diversité.
Puis se pose la question de la relève et de l’installation de nouveaux producteurs sur la commune. Tristan décide d’accueillir sur sa ferme des jeunes agriculteurs. L’idée est de les accompagner en leur offrant un terrain et un espace de vente. Les membres de l’association leur prodiguent conseils techniques et financiers pour le développement de leur activité.
Rachat de terres
Et afin de faciliter l’ancrage agricole local, producteurs et adhérents montent également un outil de gestion du foncier pour pouvoir acheter des terres collectivement et les mettre en location aux agriculteurs. « Au Puy-Sainte-Réparade, il y a 2 000 hectares agricoles. Seulement une vingtaine servaient à nourrir les habitants de la commune. A peine 1% c’est délirant », s’indigne Tristan. La démarche n’est pas qu’économique, elle est aussi politique. « Les adhérents peuvent se dire que ces parcelles louées aux nouveaux agriculteurs leur servent à s’installer mais aussi à cultiver des produits dont tout le monde bénéficiera ensuite », poursuit Tristan. Ainsi, deux installations récentes ont vu le jour au Puy : l’une en plantes aromatiques, l’autre en maraichage bio. Une véritable éclosion pour jeunes pousses, nées aux Jardins de Paradis !
L’agriculture au cœur de la Cité
L’offre diversifiée et structurée de la plateforme paysanne a permis d’élargir l’action à la restauration collective. Tristan rencontre en 2015 la direction du collège Louis Philibert du Puy-Sainte-Réparade et le chef cuisinier de la cantine, M. Suvio. « Le chef s’est tout de suite montré très favorable à se servir en bio auprès de producteurs locaux. Son implication a vraiment facilité les choses » nous explique Tristan.Ainsi une partie des repas servis aux collégiens puechens est désormais issue de la production bio ultra locale, à coût quasi identique.
Et les actions à destination des collégiens ne s’arrêtent pas là ! Le Collège et l’ADAPSR mettent également en place un dispositif qu’ils nomment « Un jardin, Une cuisine ». D’un côté, l’association met à disposition huit grands bacs de plantation d’herbes aromatiques. Les élèves ont la charge de l’entretien, de la cueillette… et de la dégustation. De l’autre, une visite annuelle est organisée pour les collégiens dans l’une des exploitations agricoles avec travaux pratiques de plantation, récolte…
CCAS, EPHAD… d’autres actions en cours
Il est à noter que ce dispositif a été mis à l’honneur au niveau départemental. Le collège devrait être pilote dans le cadre du « Manger autrement au Collège » du Plan Charlemagne*.
Le collège n’était qu’une étape de plus. La dynamique locale et citoyenne enclenchée continue. L’ADAPSR développe ainsi un partenariat avec le Centre Communal d’Action Sociale afin d’apporter une partie de sa production aux personnes démunies. « Nous allons livrer gratuitement à des gens qui ont faim », explique Tristan. Mais aussi auprès de l’EPHAD avec, dans un premier temps, l’organisation d’un parcours olfactif de plantes aromatiques, notamment pour les malades d’Alzheimer.
« Nous constatons que la population est ouverte à toutes ces initiatives et qu’elles sont viables pour les producteurs mais nous ne savons pas comment notre PAT va être intégré à celui plus global des Bouches du Rhône», conclut Tristan.
* Dispositif départemental qui vise à moderniser les conditions d’apprentissage des élèves et à développer les pratiques écologiques.
—————————————————————————————————————
Pour aller plus loin
Qu’est ce qu’un Projet Alimentaire Territorial (PAT) ?
Les PAT ont été initiés par la loi d’Avenir pour l’Agriculture, l’Alimentation et la Forêt du 13 octobre 2014 (Art 39). Par une politique alimentaire de proximité, ils permettent de répondre à des enjeux écologiques, économiques, sociaux et de santé sur un territoire donné, en fonction des spécificités de ce dernier. Ils naissent le plus souvent de l’initiative d’agriculteurs et de consomm’acteurs (comme nous le montre l’exemple de Tristan Arlaud), et sont orchestrés ensuite par les institutions et les pouvoirs publics.
Ils sont construits autour de l’objectif d’une alimentation saine, durable et en circuits courts, avec une meilleure connaissance du public sur ce qu’il consomme et ceux qui produisent.