Dans le cadre d’un appel à projets lancé par l’Etat et financé par l’ADEME, cinq initiatives régionales ont été primées. Elles confirment l’engouement croissant des habitants et des visiteurs pour des séjours plus « durables », reconnectés à la nature et à la culture locale.
C’est un fait, la crise COVID a mis à mal la filière tourisme, avec une baisse de fréquentation globale d’environ 60% en 2020. Au-delà des aides dont a bénéficié le secteur durant la pandémie, le plan « France Relance » de l’Etat a inclus un fonds « Tourisme Durable ». Doté d’un montant de 50 M€, il a pour objectif d’encourager la filière à s’engager dans la transition écologique.
Privilégier le ressourcement et la découverte immersive
Un appel à projets a été dédié à l’émergence et au développement d’offres de slow tourisme. Il a ainsi permis d’identifier et de financer des initiatives « privilégiant le ressourcement et la découverte immersive des territoires, dans le respect de leurs habitants et de l’environnement, tout en contribuant au dynamisme économique local » (source : Ministère de la Transition Ecologique ). L’enveloppe globale de cette opération est de 4,7 M€. 5 dossiers parmi les 73 retenus au niveau national se situent en Région SUD PACA.
Du Var aux Alpes provençales
Les lauréats sont aussi divers qu’un lodge en connexion avec la nature à Valensole, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Dans le Var, le domaine « Une Campagne en Provence« , propriété agricole, forestière et touristique bénéficiant déjà de l’Ecolabel Européen, a choisi de créer un sentier forestier avec espaces de pause et d’observation, et de proposer des bains de forêt. Dans les Alpes Maritimes, ce seront des séjours-découverte transfrontaliers de « Cocina Bianca » (cuisine blanche), proposés par l’Auberge St Martin dans la plus pure tradition pastorale, ou encore la remise en activité d’un rucher fortifié dans la vallée de la Roya (Alpes-Maritimes).
Herboristerie et bain de forêt au pied du Pic de Bure
Nous avons choisi d’aller découvrir les séjours de « shinrin-yoku » ou bain de forêt dans le Dévoluy (Hautes-Alpes). Nous rencontrons à cet effet l’instigateur de cette pratique, Luc Bernard. A « l’Herbier du Dévoluy », il est tout à la fois accompagnateur en montagne, phytologue-herboriste, mais aussi agriculteur. Il cultive 1 ha de lavande fine qu’il produit et récolte à l’ancienne, ainsi que des edelweiss. Dernièrement, il s’est formé à la « Forest-Therapy ». C’est une pratique que préconisent les médecins japonais comme remède à la frénésie de la vie en ville.
Ouïe, odorat, toucher…
Pour lui, il s’agit avant tout d’une « reconnexion intime au vivant ». Loin de la caricature de la calinôthérapie, trop souvent associée à la sylvothérapie, les séances vont bien au delà, en faisant appel à l’ensemble des sens : l’ouïe, l’odorat, le toucher participent ainsi aux bienfaits du bain de forêt.
Des moyens pour une cabane forestière
Le projet retenu par l’ADEME, financeur de cette initiative nationale en faveur du slow tourisme, permet à Luc d’aménager une cabane au cœur de la forêt d’épicéas, située à proximité de son exploitation. Les groupes la rejoignent à pied en 30 mn, tout en herborisant.
Toilettes sèches, tri sélectif…
Tout a été conçu pour qu’elle s’intègre le mieux possible dans cette pessière (forêt d’épicéas), remarquable tant au niveau de la flore que de la faune. « On n’a qu’une envie, c’est protéger cet environnement. Et pour aimer, il faut avant tout connaître » nous glisse Luc… Dans cette cabane, dont l’aménagement a été retardé à cause de la pénurie de bois, tout est prévu : la plateforme pour accueillir les cours de Qi Gong ou de yoga, les toilettes sèches, le tri sélectif…
Découverte des huiles essentielles, lecture des paysages
Au cours de la journée, les stagiaires (de 8 à 12 personnes) apprendront à reconnaitre les plantes pour leur utilisation médicinale ou en cuisine. Ils apprendront surtout à se reconnecter à la nature. Stages de fabrication de cosmétiques naturelles, cuisine sauvage, cueillette des truffes, découverte des huiles essentielles, lecture des paysages se succèdent au fil des saisons. La construction quant à elle devrait être terminée cet été et accueillir ses premiers stagiaires.
En fait, les principes du slow tourisme tiennent en quelques mots : un état d’esprit. Il n’est certes pas synonyme d’inactivité, voire de lenteur. Il s’agit plutôt d’une autre manière d’aborder le voyage.
Pour en savoir plus
Slow tourisme, nouvelle tendance ou tourisme tendance ?
La définition officielle retenue en France est « Un tourisme à rythme lent, garant d’un ressourcement de l’être, peu émetteur de CO², synonyme de patience, sérénité, découvertes approfondies, d’amélioration des connaissances et des acquis culturels ». Elle est inspirée de la slow food et du slow travel et d’une façon générale de tous les mouvements slow life.
Des études convergentes montrent l’envie de touristes de voyager autrement. C’est ce que mettent en évidence l’étude menée en 2022 par YouGov et le sondage conduit par Booking.com en février 2022.
Privilégier la France ou les destinations proches, se déplacer de manière durable, mieux connaître l’impact environnemental du transport utilisé, favoriser les rencontres et la découverte approfondie des lieux, « prendre son temps », se déconnecter de son rythme de vie quotidien… le tout à rebours d’une frénésie d’accumulation de destinations et de lieux « top tendances » : les prises de conscience sont réelles et les réponses apportées, multiples.
Les autorités touristiques françaises se sont donc emparées du sujet. Atout France a par exemple réalisé avec le Ministère des Affaires Étrangères des tutos-vidéos pour faire découvrir ou mieux connaître les filières porteuses du slow tourisme et de l’écotourisme. La réponse financière est là, avec le Fonds Tourisme Durable.