Jusqu’au 27 novembre, la Semaine de réduction des déchets se concrétise par plus de 7 000 actions menées en France. Chargé de projet en 2022 pour la Mission Etang de Berre, Geoffrey Chappe nous parle de l’association Wings of the Ocean. Elle mène depuis 2020 des actions de dépollution de cette zone.
Créée en 2018 par Julien WOSNITZA, Wings Of The Ocean a d’abord réalisé des missions itinérantes en bateau pour dépolluer les océans. Pourquoi avoir choisi d’accoster sur l’Etang de Berre ??
GC : Après une tentative de dépolluer en mer, il s’est avéré que les résultats escomptés n’étaient pas au rendez-vous. Très vite l’association change sa manière d’agir et se concentre sur la dépollution des côtes et des littoraux. Mais il s’agit surtout d’agir « à la source » : 80% des déchets trouvés dans les mers et océans proviennent des affluents. Nous avons donc sélectionné les lieux où notre action pouvait être particulièrement visible et effective. Natif de Marseille, j’ai toujours connu l’Etang de Berre dont l’image est celle d’un lieu « sacrifié ». Je suis ravi d’avoir pu participer à la mise en œuvre de sa dépollution. Elle est la dernière étape qui devrait lui permettre d’enfin retrouver son écosystème original.
Votre première expérimentation s’est déroulée à partir de 2020 sur l’Ile des trois frères, face au port de La Mède. Un lieu pourtant totalement inhabité. C’était un test avant de vous consacrer plus largement à l’Etang de Berre ?
GC. Nous avions en effet constaté que les déchets étaient plus nombreux dans le sud de l’Etang. Quant à cette île, nous l’avions choisie parce que sa position fait que le vent et les courants y ramènent énormément de déchets plastiques, de grande taille coincés entre les rochers, ou des micro déchets qui se décomposent sur la terre. Elle a donc été notre première zone d’étude et de dépollution.
Après plus de 2 tonnes de déchets récoltés, nous nous sommes consacrés à partir de 2021 au projet collaboratif de dépollution de l’Etang de Berre.
Être présents sur un secteur défini pendant une durée plus longue apporte plusieurs avantages : obtenir une expertise terrain, dépolluer les mêmes endroits, collecter des données, comprendre les différentes pollutions, trouver des solutions et surtout travailler avec les acteurs locaux (communes, entreprises, associations..). Tel était notre programme 2021-2022, sur 7 mois. En 2023 nous assurerons cette mission sur toute l’année.
Vous dites qu’en langage humanitaire cela s’appelle « renforcer les capacités locales ». Cela signifie quoi concrètement dans le cadre de cette mission ?
Notre ambition, dans un premier temps, c’est d’accompagner tous les acteurs de la collecte et du traitement des déchets afin de créer des synergies et de favoriser le « travailler ensemble » sur le long terme.
Nous collaborons avec des structures spécialisées telles que Remed Zero Plastique ou Zero Dechet Sauvage. Sur l’Etang de Berre, nous avons fait le choix de travailler sur la durée. Nous voulons créer un vrai réseau d’acteurs permanents et apporter des solutions concrètes. Les élus avec lesquels nous travaillons étaient au début un peu sceptiques, il nous a fallu faire nos preuves. Avoir du temps devant nous permet d’installer des process et de prouver notre utilité. Concrètement, nous procédons à 3 actions de dépollution par semaine, et nous prenons en charge toute la chaîne, de la collecte au recyclage ou la revalorisation des déchets collectés.
Comment ancrez-vous localement la mission ?
Nous avons mis en place des antennes locales. La mission Etang de Berre soutient depuis sa création l’antenne basée sur Marseille. Elles conjuguent leurs efforts et l’antenne apporte sa contribution à tous les projets. Sensibiliser en permanence les populations, grand public ou scolaire, à la nécessité de réduire nos déchets plastiques est un travail commun. Préparer le terrain pour développer les partenariats aussi. Organiser conjointement tout au long de l’année des actions de dépollution renforce leur impact. A titre d’exemple, elles ont créé l’évènement de la Fashion Wings en 2021. L’idée était de concevoir un défilé un peu « décalé », avec des tenues uniquement créées à partir de déchets.
Elles s’appuient sur des bénévoles, qui doivent à leur tour rechercher des partenaires, tant financiers que techniques, par exemple pour la revalorisation des déchets. Sur la mission Etang de Berre, plus de 65% des déchets collectés ont été revalorisés ou recyclés, et ce localement.
Les missions sont donc exclusivement fondées sur la participation de bénévoles ?
25 salariés œuvrent au quotidien chez Wings Of The Ocean pour toute la France. Et notre organisation est bien rodée : un chargé de projet (salarié) encadre une équipe d’une dizaine de bénévoles. Ceux-ci se voit confier les missions de sensibilisation, dépollution et revalorisation. Ils viennent de toute la France, parfois même de l’étranger. Cette année, nous avons par exemple accueilli des enseignants. Ils ont été eux même bénévoles sur la mission, et prendront en charge la mise en œuvre de la sensibilisation des scolaires. C’est d’ailleurs un de nos publics cibles en 2023.
Qui sont ces jeunes qui rejoignent votre association ?
Le profil des bénévoles est très varié. Nous avons des ingénieurs, des scientifiques, mais surtout une population de jeunes gens engagés. Ils suivent tous la formation interne de Wings of the Ocean. Puis ils partagent leur quotidien pendant minimum 1 mois. C’est l’engagement que nous leur demandons d’assurer lors de leur candidature. Nourris, logés, blanchis, ils finissent par construire une vraie communauté de valeurs. C’est pour tous une aventure humaine hors du commun !
De quels moyens financiers disposez vous pour mener toutes ces actions ??
Nous sommes et nous restons viscéralement un mouvement associatif et nous tenons à notre indépendance. Les communes pour lesquelles nous intervenons financent la mission à hauteur d’à peu près 10% . La majeure partie de nos ressources provient cependant d’entreprises, dont la contribution se traduit en matériel plutôt qu’en argent. Nous projetons aussi d’intervenir sur des projets de dépollution, internes à l’entreprise, voire de faire du consulting. Mais nous n’y perdrons pas notre âme.
Et si vous aviez un message à faire passer, quel serait-il ???
Rejoignez nous sur les actions de dépollution tout au long de l’année ! Et si vous disposez autour de l’Etang de Berre d’une grande maison où nous pourrions loger dans de bonnes conditions tous nos bénévoles, ce serait super !!! Et faites comme Julien WOSNITZA le fondateur de Wings Of The Ocean, « Face à toutes les problématiques environnementales, pour ne pas sombrer dans l’éco anxiété et la dépression pure et simple, j’ai opté pour des solutions concrètes : m’engager au quotidien ».
Photo de 1 : Dépollution en bord de mer avec Wings of the Ocean © Victor-Janjic
Wings of the Ocean une association qui lutte contre la pollution plastique dans le but de préserver le vivant.
Elle s’est donnée comme mission d’agir directement sur la pollution en procédant à 3 actions de dépollution par semaine et par projet, de sensibiliser le public en réalisant régulièrement des interventions régulières (conférences, ateliers, participation à des évènements..), de réduire la pollution en accompagnant les entreprises à baisser leur production de plastique, en travaillant avec les pouvoirs publics pour réduire la pollution sur leur territoire, en constituant un réseau de partenaires locaux de la revalorisation pour donner une seconde vie aux déchets. (source : https://www.wingsoftheocean.com)
En 2022, Wings of the Ocean devient la première association de dépollution de France. Elle compte plus de 25 collaborateur.rice.s. Elle travaille aux côtés de nombreux partenaires qui la soutiennent essentiellement en termes logistiques.
Deux autres secteurs font l’objet de missions longue durée, il s’agit de l’Etang de Thau et le Bassin d’Arcachon. Deux navires sillonnent îles et côtes, tant en France qu’à l’étranger, pour travailler avec marins, plaisanciers et public sur leur responsabilité dans la pollution plastique.
Antenne de Marseille : Contact : Maylis 06 43 47 71 08