En prise sur la Durance et long de 57 km, le canal de Manosque alimente en eau cultures, jardins et communes depuis près de 150 ans. D’importants travaux conduits ces dernières années ont permis l’économie de 12 millions de m3 d’eau par an.
Entre Château-Arnoux-saint-Auban au nord et Corbières-en-Provence au sud, le canal de Manosque travers 13 communes. Il enjambe ravins et ruisseaux grâce à 73 aqueducs. Il a nécessité la construction de 197 ponts, tant la topographie du territoire est accidentée. Le canal maître est prolongé par près de 200 km de filioles, ces rigoles qui desservent les parcelles.
Depuis le barrage de l’Escale, il prélève chaque année 55 millions de m3 d’eau dans la Durance, qui irriguent 3150 ha. Parmi les 4600 adhérents de l’association qui gère l’ouvrage, outre les agriculteurs, on trouve les propriétaires de jardins d’agrément et potagers, ainsi que quelques industriels et communes pour leurs réserves incendie ou l’arrosage des espaces verts.
Un canal et des hommes
Mais le canal de Manosque a aussi d’autres vertus. Il permet la recharge des nappes souterraines par infiltration (là où il est construit en terre) et soutient l’étiage des cours d’eau. Et puis sa coulée verte structure les paysages. Il fait enfin partie du patrimoine historique et culturel du territoire.
Dès 2004, l’Association Syndicale du Canal de Manosque (ASCM) se lance dans l’élaboration d’un contrat de canal, le premier en France. Il réunit une quarantaine d’acteurs et partenaires qui vont travailler ensemble. Objectif principal ? Moderniser la desserte et améliorer la gestion afin d’économiser l’eau, dont une partie revient aux milieux naturels.
Plus moderne et plus écolo
Des travaux de grande ampleur sont ainsi décidés et financés à hauteur de 11 M d’euros principalement par l’Agence de l’Eau Rhône-Méditerranée-Corse mais aussi par la Région, l’Europe et l’ASCM. A ce premier contrat de canal achevé en 2017 a succédé un deuxième contrat. Il est en cours jusqu’en 2024 pour un montant de travaux équivalent.
Car la procédure a porté ses fruits et contenté la plupart des participants. Au programme des aménagements, le bétonnage du canal maître, là où menaçait l’affaissement des berges. Toutefois en faible proportion, au regard de la difficulté à obtenir des financements publics pour ce type de travaux.
Autres aménagements, le passage d’une desserte gravitaire périodique à partir des rigoles (chaque bénéficiaire a un tour d’eau), à une desserte basse pression utilisable à la demande. Ici, on a enterré les canalisations. Cette modernisation, en plus d’améliorer la qualité du service, a généré des économies d’eau.
Et puis on a construit sur le canal maître des seuils hydrauliques, 7 au total, dont deux sont motorisés. Ils permettent une hauteur d’eau suffisante pour alimenter les réseaux secondaires et améliorent ainsi la régulation des flux. De nombreux points de mesure assurent le meilleur ajustement au plus près des besoins. Cela avec un débit moindre, et en économisant l’eau.
Bilan positif
Résultat du 1er contrat de canal : 6.7 millions de m3 économisés chaque année dont 3.3 millions sont restitués aux milieux naturels. Soit 15% d’économie. Pour le deuxième contrat en cours, l’estimation est de 5.7 millions de m3 économisés par an, dont 3.5 millions rendus à la nature.
Des bénéfices bienvenus en ces temps de sécheresse, canicules et de changement climatique. Mais aujourd’hui, l’ASCM est endettée et s’interroge sur le financement de travaux de sécurisation pourtant nécessaires sur le canal principal. Si l’ouvrage a encaissé la sécheresse de 2022, il pourrait ne plus fonctionner en cas de restrictions plus sévères.