Victoire des cantines rebelles pour Martigues et Lauris
Ces deux communes ont fait briller notre région à la remise des trophées de l’association Un Plus Bio, à Paris, la semaine dernière. Engagés depuis longtemps au service d’une alimentation bio et locale, levier de transformation des territoires, leurs élus détaillent ici les résultats de leur politique et leurs projets.
Après Mouans Sartoux (2016), Saint-Rémy (2018) et Miramas (2019), voilà que deux communes provençales sont récompensées par une Victoire des cantines rebelles cette année. Dans le Parc du Luberon,Lauris et ses 4800 habitants reçoivent le prix de l’engagement politique. Sur l’Etang de Berre, Martigues, près de 50 000 habitants, celui de la démocratie alimentaire. Pour les élus des deux communes, ce prix récompense un travail accompli, et mobilise les énergies pour poursuivre le chemin.
Le Luberon, « montagne de santé »
« Au fond du cœur, c’est un plaisir, une reconnaissance, avoue André Rousset, le maire de Lauris. Mais aussi l’obligation d’élargir nos actions, pour que le plus grand nombre de gens mangent bio et local. Pour la planète, pour la santé, pour les paysages, les champs travaillés c’est plus joli ! Pour le tourisme, l’économie, pour le moral… En fait l’alimentation touche à tous les champs de la vie ».
A Lauris cet engagement politique a déjà une vingtaine d’années. Il a d’abord fallu mettre en ordre de marche de nombreux acteurs. Depuis les cuisiniers jusqu’aux enfants –excellents éducateurs pour leurs parents- en passant par les équipes municipales.
75% de bio dans les cantines
« Le plus difficile au début, se souvient André Rousset, c’est de faire accepter l’idée que manger bio n’est pas un truc cher réservé aux bobos. On peut rester à prix constant, simplement en réduisant un peu la consommation de viande ». Et puis les élus ont soutenu les producteurs, notamment grâce à la création de zones agricoles protégées autour du village. Aujourd’hui, le restaurant municipal de la commune sert aux scolaires 330 repas composés à plus de 75 % de produits bio. Et bientôt aux personnes âgées.
« L’enjeu maintenant, c’est de faire passer l’idée du bio et local aux voisins », se réjouit le maire de Lauris. Il va proposer de livrer les écoles environnantes. Et il compte sur la Cité vivante de l’alimentation qui doit ouvrir ses portes sur sa commune à l’horizon 2024, si tout se passe bien.
Un projet ambitieux porté par l’association Au Maquis, en partenariat avec le Parc naturel régional, qui déploie son Projet alimentaire territorial (PAT), sera un lieu d’échanges et d’activités dédié à l’alimentation. On y fera des recherches, on y accueillera les acteurs –politiques, producteurs, cuisinier, citoyens- pour partager et diffuser les bonnes pratiques.
Et André Rousset entend porter la bonne parole jusqu’au sein de l’Association des Maires de France, où il milite pour le bio et local au sein des commissions Education et Santé.
A Martigues, la démarche alimentaire a également été primée. « La ville a adhéré à Un Plus Bio en 2012, explique Annie Kinas, adjointe à l’Education et à l’Enfance. Grâce à ce réseau de collectivités locales, on a plus d’outils pour développer les circuits courts et la bio dans les assiettes des élèves. Aujourd’hui, notre cuisine centrale sert 4800 repas par jour aux enfants du primaire à 40% bio et local. Pour les crèches, nous sommes à 50% ».
Un résultat qui a nécessité pas mal de changements dans les pratiques professionnelles de toutes les équipes. Et aussi de protéger une zone agricole autour de la ville afin de favoriser l’installation de nouveaux agriculteurs. Autre levier, le recensement de terres en friche. La ville passe ensuite des partenariats, comme avec le paysan-boulanger ou le producteur de Brousse du Rove.
La politique alimentaire de la ville passe aussi par l’éducation et la sensibilisation y compris sur le gaspillage ou l’environnement. Des actions tous azimuts qui justifient le prix de la démocratie alimentaire décerné à Martigues, qui entend mobiliser l’ensemble de sa population. Pari réussi avec « Le Goût de Martigues ».
L’alimentation est une fête
« Le goût de Martigues », c’est une manifestation qui se déploie à la belle saison sur plusieurs journées et soirées et voit les habitants, non seulement partager des repas gratuits, mais aussi les préparer. Aux côtés du personnel communal de la cuisine centrale, des citoyens intéressés, bénévoles dans les centres sociaux ou les maisons de quartier, membres d’associations ou simples amoureux de la cuisine, viennent partager leurs recettes, et mettre la main à la pâte pour servir des centaines de repas.
« On arrive ainsi à créer ce lien entre des personnes qui ne se connaissaient pas. On pousse la démocratie alimentaire jusque-là, se réjouit l’adjointe. Chacun échange sur les produits, la manière de les traiter, dans une ambiance chaleureuse et festive. On boucle ainsi nos objectifs de servir une nourriture de qualité à toute la population ».
Des ambitions pour tous
Mais la ville ne compte pas s’arrêter là. « On doit avancer dans tous les domaines, de la crèche aux anciens, énonce Odile Teyssier-Vaisse, adjointe déléguée à la politique alimentaire communale et à l’agriculture. Trouver de nouveaux fournisseurs (NDLR : aujourd’hui, céréales, pâtes, riz et yaourts sont à 100 % bio), passer au tout bio en 2022 pour les surgelés, réduire encore la part des produits transformés, développer la fabrication des pâtisseries. Cela passe par l’achat de matériel et des formations… ».
Mais le gros dossier, c’est celui de la demande de certification Ecocert pour sa restauration collective. Une charte exigeante, que la Ville espère obtenir dans les deux ans. « On veut être encore plus performants, plus bios, susciter plus de communication entre ceux qui cuisinent et ceux qui consomment », conclut Odile Teyssier-Vaisse.
L’équipe municipale revendique une politique alimentaire respectueuse de la santé et de l’environnement fondée sur des services et une cuisine centrale 100% publics.
2021 a vu la 6e édition de cette grande fête nationale organisée à Paris. S’y retrouvent les acteurs des politiques publiques de l’alimentation engagés, ainsi que de nombreux intervenants et témoins. Outre la célébration des lauréats des Victoires, l’association Un Plus Bio organise une session générale et des ateliers de travail. Objectif : une santé commune humaine, environnementale et sociale. Autrement dit, changer le monde par l’assiette. Et cela passe pour l’association, par les politiques publiques de l’alimentation.
L’association Un Plus Bio
Son credo ? Manger mieux est au centre de la transformation des territoires et la restauration collective un levier fondamental. Et les cantines, « du champ à l’assiette », sont aujourd’hui au carrefour de préoccupations économiques, sociales et environnementales essentielles. Ses missions ? Sensibiliser, animer et accompagner. Un Plus Bio est notamment à l’origine de la création du premier réseau de collectivités, le Club des Territoires. Il est composé d’élus et de décideurs convaincus que l’alimentation est un instrument puissant du développement local.
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