Tout le monde a vu dans les champs les km de tuyaux d’arrosage qu’utilisent les agriculteurs. Certains sont renouvelés chaque année, et quasiment pas recyclés. L’idée de Stéphanie Dick, à Arles : les transformer en cabas à usages multiples !
Transporter facilement ses légumes, ses bocaux, son attirail de gym ou de peinture, ranger ses revues ou alors conserver ses bouteilles en verre en attendant d’aller au container… Les « cabas tuyau » se plient de bonne grâce à toutes les demandes. Pratiques, solides, résistants à la pluie comme au soleil, faciles à nettoyer, ils sont même beaux, malgré leur origine modeste : le polyéthylène basse densité.
Inventer les outils
Enroulé, lavé, séché, tissé à la main, grâce à des gabarits et moules en carton, bois ou plastique, le tuyau devient un cabas –monomatériau- lui-même recyclable. Aucune colle, aucun colorant, il est forcément noir avec une bande de couleur (visible ou non, à la demande du client).
Les tuyaux d’arrosage réumployés dans de solides cabas ©S.Dick
Il suffisait d’y penser ! Et ça c’est le métier de Stéphanie Dick. Cette écodesigner n’en est pas à son premier essai. Impliquée dans le mouvement Zero Waste, elle est toujours à l’affût d’une nouvelle idée pour inventer un avenir à des objets orphelins.
« Je ne peux pas m’empêcher de chercher des usages nouveaux à ce qui est jeté, sourit Stéphanie Dick. J’ai mis ce modèle au point, mais je ne sais pas ce que le projet deviendra. Aujourd’hui on teste tous les possibles ».
Un projet collaboratif
Pour l’heure, les cabas sont dans les tuyaux, mais encore en phase de tests. Parmi les bonnes fées penchées sur le berceau, le Pôle Culture et Patrimoines qui porte le projet depuis 2020 et les Amis des Marais du Vigueirat, association gestionnaire de la réserve nationale du même nom, située en Camargue. Ses salariés en insertion ont lancé la toute première fabrication en série.
D’abord récupérer les tuyaux dans les champs ©S.Dick
« Pour nos équipes, c’est un apport de travail. Mais c’est aussi très intéressant de trouver un débouché et de valoriser des déchets agricoles, explique David Grzyb, directeur de l’association des Amis des Marais du Vigueirat. C’est cohérent avec notre vocation de protéger l’environnement, de réduire les déchets. De plus ce projet est très imaginatif et expérimental, si un modèle économique peut se construire sur cet exemple, ce sera très bénéfique ».
Trouver le modèle économique
En attendant, grâce à un financement participatif, cent cinquante sacs commandés vont être fabriqués en novembre. Mais beaucoup reste à faire. De l’outillage nécessaire –type enrouleurs, station de lavage, mode de séchage… – au prix de vente, en passant par les conditions de récolte des tuyaux usagés, ou le mode de commercialisation.
Un cabas solide, élégant et vertueux©S.Dick
Ce qui est sûr, c’est que la matière première est abondante. Même si pour le moment, le choix se porte uniquement sur les tuyaux des maraîchers bio, qui doivent renouveler ce matériel goutte-à-goutte à chaque récolte. Aujourd’hui, peu de solutions de recyclage existent pour ce matériel, et elles sont peu rentables. Ce polyéthylène basse densité, mal aimé, « personne n’en veut », souligne Stéphanie.
Alors reste à trouver un ou une volontaire pour se lancer dans l’affaire. Entreprise existante ou en création, structure intéressée, l’appel est lancé !
Une bonne idée pour réemployer les tuyaux usagés ©S.Dick
Dernière minute : Parmi les outils inventés pour la fabrication des cabas, l’équipe vient de trouver que les tourets de fibre optique font de parfaites bobines pour les tuyaux ! Comme ces tourets sont en général non recyclés, encore une bonne manière de réduire les déchets ! Stéphanie Dick lance un appel aux poseurs de fibre en Pays d’Arles, et propose de venir récupérer ces précieux objets …
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Pour aller plus loin
Les Amis des marais du Vigueirat
À la jonction du delta du Rhône et de la plaine de la Crau, la réserve naturelle nationale des marais du Vigueirat s’étend sur plus de huit kilomètres de long et 919 hectares de superficie. Elle est gérée par l’association des Amis des Marais du Vigueirat.
Si son ADN est la protection de cet espace naturel riche mais fragile, elle a très tôt mis en place des actions d’accueil et de sensibilisation des publics. Et lancé également une politique d’accompagnement à l’emploi, à travers des chantiers d’insertion qui emploient aujourd’hui 26 personnes.
Les équipes des Marais du Vigueirat à la fabrication des cabas tuyau ©S.Dick
Diversifier les activités
Plus souvent occupés à l’entretien des 1500 hectares d’espaces naturels des marais du Vigueirat et de Meyranne, au ramassage de plantes invasives qui seront transformées en fibres textiles ou en peintures, grâce à un partenariat avec l’atelier LUMA, ou encore à l’entretien et l’embellissement des aires d’autoroute, les salariés sont cette fois passés à la fabrication des cabas tuyaux.
Manière aussi pour ces personnes éloignées de l’emploi et souvent en proie à des difficultés quotidiennes, de toucher du doigt la question des déchets et des solutions très locales et pratiques qui peuvent être mises en œuvre pour les réduire.
Le Pôle Culture et Patrimoines
Il a été créé en 2007 par la CCI du Pays d’Arles. Objectif ? Etre un outil de développement économique pour les acteurs des filières créatives, culturelles et patrimoniales. Il regroupe aujourd’hui un réseau de nombreux professionnels (entreprises, labo de recherche, associations, institutions ou encore centres de formation…). Le Pôle soutient notamment les projets innovants et collaboratifs. C’est à ce titre qu’il porte les cabas TUYAU.
