De novembre 2023 à avril 2024, chaque citoyenne et citoyen a pu participer et apporter sa contribution au débat de la façade Méditerranéenne. Quels enseignements en tirer ? Décryptage avec son coordinateur, Etienne Ballan.
S’il fallait trouver un seul mot pour synthétiser le grand débat sur la mer méditerranéenne, cela serait mesure. Parole d’Etienne Ballan, délégué de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) pour la façade Méditerranée. « Tout au long du débat, il y a eu beaucoup de demandes de modération, de mesure, affirme le sociologue et urbaniste. En effet, il n’y a pas eu d’opposition absolue envers tel ou tel projet, la vraie demande est que l’État puisse prendre le temps d’évaluer les retours d’expériences, de prendre en compte les résultats des scientifiques, de faire mieux même si cela veut dire faire moins ».
Avec 21043 personnes présentes aux 375 événements proposés pour l’ensemble des façades maritimes, le bilan du grand débat national est très positif. « C’est un débat qui a mobilisé très fortement le public du fait de la variété des sujets et de la variété des dispositifs de participation, se réjouit Etienne Ballin. Il y a eu les bars des sciences, les interventions dans les écoles et les lycées, les travaux menés par des associations d’insertion, les grands ateliers de travail publics, les webinaires, les régates en mer participatives… ».
En cinq mois, tous les cercles ont été représentés, des scientifiques en passant par les gestionnaires des aires marines protégées et les collectivités locales, mais aussi, et en grande partie, des personnes sincèrement intéressées par la mer.
Une volonté forte de prise de conscience et de concertation
« La mer en débat » a été le premier débat public de planification maritime, en vue notamment de la mise à jour des Documents stratégiques de façades (DSF) qui vont déterminer l’avenir de la mer et des littoraux. La technicité du sujet n’a fait que motiver davantage les citoyens et citoyennes à la participation et plus de 4000 arguments et propositions différents ont été recueillis lors du débat national. A la clé, cinq points prioritaires, notamment l’enjeu de l’information et de la connaissance, l’adaptation au changement climatique et la lutte contre les pollutions terrestres, des conditions au développement de l’éolien en mer, les spécificités des zones de protection fortes, l’enjeu d’une gouvernance partagée.
« Ce débat sur la Méditerranée n’a pas été dominé par une thématique plutôt qu’une autre, comme cela a été le cas par exemple pour nos collègues sur les autres façades », explique Etienne Ballan. « Les deux thèmes qui ont vraiment suscité beaucoup de réactions ont été la protection de la biodiversité et la volonté que l’on change d’échelle en clarifiant la règlementation des aires marines protégées pour qu’elle soit plus stricte, mieux connue et mieux surveillée ». Il y a un consensus sur les aires marine protégées pour qu’elles soient co-construites avec tous les acteurs dont évidemment les pécheurs, les plaisanciers, les acteurs du tourisme en général.
« Le public revendique plus d’efficience dans le sujet de la protection de la biodiversité et, à partir de là, tout un tas de sujets en découlent, notamment l’éolien flottant en mer, précise le délégué régional de la CNDP. Les parcs éoliens, pourquoi pas, mais une fois que l’on aura bien calé et précisé où sont les zones de protection forte, comme celle qui est notamment demandée pour les canyons du golfe du Lion ».
Concerter avec tous les acteurs de la mer
La question du tourisme a bien sûr été centrale dans le débat. « Le constat est là, la mer est pleine. Elle ne peut plus supporter davantage de pression, annonce Etienne Ballan. Et l’existence même du tourisme est remise en question. Si la côte disparait, il faudra réinventer ce même tourisme. Cela n’est pas simple à entendre pour les professionnels du secteur qui font déjà beaucoup d’action de sensibilisation ».
Et pourtant, la sensibilisation ne suffit plus. Le public veut une régulation du tourisme, veut des actions claires, mais surtout des actions concertées. « La pêche est finalement bien armée pour cela. Aujourd’hui, en Méditerranée, les pécheurs sont déjà des partenaire hyper engagés et motivés. Quand en Corse nous entendons comment les pécheurs sont associés dans les aires marines protégées et qu’ils veulent décarboner les moteurs plutôt que d’avoir des plus gros bateaux… le changement est enclenché ! », affirme-t-il.
Quel impact sur les décisions de l’État
« Ce n’est pas à nous de décider du poids que l’issu du débat va avoir. En revanche, nous garantissons au public qu’il y aura de la vigilance. L’État devra justifier ses choix au regard de ces retours et nous suivrons cela avec la plus grande attention », revendique Etienne Ballan.
Les résultats seront présentés au public lors d’un webinaire de restitution des principaux enseignements du débat en Méditerranée (inscriptions ici).
Rendez-vous mercredi 17 juillet, à 18h. Restons mobilisés !