Installée sur cette petite terre près des côtes charentaises, la famille Mineau exploite une ferme aquacole bio et une auberge. Un défi relevé depuis trois générations par ces ardents défenseurs de l’écosystème insulaire.
Ils ne vivent pas comme nous mais s’en portent fort bien. Elisabeth, Jean-Pierre et Jean-Philippe Mineau habitent et travaillent sur l’île Madame, un îlot de 75 ha relié au continent seulement à marée basse, à l’embouchure de la Charente. « L’héritière » de la famille, Elisabeth, son mari, Jean-Pierre (venu du continent) et leur fils, Jean-Philippe, sont à la tête de l’unique exploitation de l’île, une ferme-auberge aquacole bio produisant huîtres de claires, crevettes impériales, salicorne, viande de mouton, sarrasin, avoine, petits pois, orge et lentilles (ouf !).
Leur existence singulière, conditionnée aux marées qui scandent le passage en voiture sur l’unique chaussée submersible, ils n’en changeraient pour rien au monde. « Nous avons une double vie insulaire et continentale. C’est un choix que nous revendiquons. Ici nous sommes en harmonie avec la nature, c’est une passion familiale commune », éclaire Elisabeth.
« A raté l’école à cause de la marée »
Son grand-père a acheté des terres à Madame pour agrandir la ferme du continent et pratiquer l’élevage. Ses parents et leurs enfants ont décidé d’y vivre… avec toutefois des exceptions. « Jeune, j’allais à l’école à Saint-Nazaire-sur-Charente. Combien de fois ai-je empruntée la chaussée sur les épaules de mon père, alors que l’eau montait ! », se souvient Elisabeth. Qui dormira maintes fois sur la terre ferme, dans l’autre maison familiale. Pareil pour Jean-Philippe. Lui se rappelle les mots d’excuse scolaires : « a raté l’école à cause de la marée » ! « Nous sommes quand même en décalage avec la société », reconnait Jean-Pierre. Si au bout « de 15 jours sans sortir de l’île, nous ressentons le besoin de retrouver la société », selon Elisabeth, le travail à la ferme ne leur laisse guère le temps de gamberger.
Ateliers « cueillette et fourchette »
Passés en bio il y a quelques années, ils ont d’abord testé la vénériculture (élevage des palourdes) avant de se consacrer à l’élevage du bar puis désormais à celui des crevettes impériales, dont les cycles de productions sont plus courts. Jadis hors des circuits de visites (sauf pour les locaux), l’île Madame reçoit de plus en plus de touristes et leur restaurant et boutique attirent du monde aux beaux jours. « Nous voulons faire connaître notre ferme et l’ouvrir au public », raconte Elisabeth, depuis le nouveau bâtiment d’accueil construit après que Xynthia a dévasté l’ancien. Ultra sensible à la préservation de l’écosystème depuis cette tempête (le Conservatoire du Littoral possède 4,5 ha sur l’île), elle organise, une fois par mois, des ateliers « cueillette et fourchette ». Son fils, lui, a le projet de s’installer à demeure avec sa femme, salariée pour l’heure sur le continent. La saga Mineau continue…