Face au réchauffement climatique : construire les coopérations autour de la Méditerranée. La Fondation pour l’agriculture et la ruralité dans le monde (Farm) a présenté mercredi 16 octobre au salon Medagri son livre blanc pour adapter les agricultures méditerranéennes au réchauffement climatique.
A l’origine de la démarche, en 2023, un constat : « la Méditerranée est un hotspot pour le réchauffement climatique », souligne Précila Rambhunjun, géographe et responsable du projet au sein de la Farm. « Elle se réchauffe 20% plus vite que le reste du monde. L’année 2022, qui a été exceptionnellement chaude, va désormais devenir la norme. Et cela va entraîner des baisses de rendement de 5% à 45% selon les cultures. » A moyen terme, on peut s’attendre à voir migrer vers le Nord des cultures du Sud, comme la pistache, l’amande ou le pois chiche. Et voir du mil ou du sorgo cultivé en Espagne voire en France.
Arbres paravents
Pour adapter les agricultures à cette nouvelle donne, la Farm a lancé un projet de recherche et de mise en relation des acteurs. Après une premlière phase d’analyse bouclée cette année avec la publication du livre blanc, la fondation va passer en 2025 à la phase d’échanges sur les stratégies et les leviers d’adaptation. Car les pays du Nord de la Méditerranée ont de quoi s’inspirer au Sud. « En Algérie, nous ne sommes pas trop concernés par le stress hydrique, détaille Sofiane Boumejeria, dirigeant d’une exploitation en polyculture et élevage de 1 000 hectares au sud d’Alger. Mais nous subissons de plein fouet le stress thermique et les vents de sable. Pour protéger les cultures, nous plantons des arbres paravents, et nous traitons par pulvérisation d’oligo-éléments. Le gouvernement a lancé un grand projet de barrage contre le vent avec la plantation de millions d’arbres. »
Au Maroc « nous sommes confrontés à des sécheresses répétitives depuis les années 1980 », rappelle Riad Balaghi, chercheur à l’Inra Maroc. « Nous avons d’abord amélioré la variété des céréales en sélectionnant les plus résistantes aux températures. Cela nous a amenés aussi à favoriser les variétés à cycles courts. Mais cela a aussi entraîné une baisse des rendements. On arrive à une limite, certaines cultures vont disparaître tout simplement. Et il va falloir réfléchir à ce qui les remplacera, et quel travail proposer à ceux qui les cultivaient. »
Défi financier
Un défi d’autant plus grand que passer d’une culture à l’autre représente souvent un investissement lourd, sans certitude de trouver un marché à terme. « Pour un olivier, il faut attendre deux ans, sept ans pour un amandier, souligne Alain Brémond, céréalier dans le Vaucluse. Et pour installer le goutte à goutte, cela coûte déjà 20 000 euros. » « Il faut un échange de technologies et de pratiques, rebondit Sofiane Boumejeria. Mais aussi un montage financier entre le Nord et le Sud, avec peut être une taxe, pour accompagner les agriculteurs dans leur adaptation. » C’est l’horizon 2026 du projet de la Farm : co construire des solutions, à la fois politiques mais aussi financières.