Lichen vert sur de l'écorce d'arbre.

A l’occasion de l’assemblée générale des coopérateur.ices de PACA CORSE (URSCOP*) à Méounes-lès-Montrieux le 21 juin dernier, Bleu Tomate s’est questionné sur la place de la coopération dans le vivant. Plantes, animaux, bactéries…La liste des interactions coopératives est longue. Décryptage.

Il n’y aurait pas de société sans coopérationselon Joël Candau, professeur d’anthropologie à l’Université de Nice Sophia Antipolis. Et c’est peu dire : que ferions-nous dans un monde où le chacun pour soi est maître ? Si “nous sommes l’espèce la plus coopérative du monde vivant” d’après certains biologistes, comme Gauthier Chapelle, nous pouvons tout de même nous inspirer de l’immensité des interactions du vivant.

Quelle coopération dans la nature ?

Dans la nature, on trouve différents types d’interaction. Ici, nous allons nous focaliser sur la symbiose, une association entre deux êtres vivants apportant un bénéfice à chacun. On peut aussi parler de mutualisme : c’est une symbiose obligatoire, c’est-à-dire que les deux êtres vivants ont besoin de l’autre pour vivre. A ne pas confondre avec le commensalisme, qui est une interaction bénéfique uniquement pour un des deux organismes.

Plante ou champignon ? Le lichen.

Ni plante, ni champignon, le lichen est présent un peu partout dans la nature, sur les troncs d’arbres, au sol, et même en bord de mer sur les rochers. C’est un champignon qui, ne pouvant fabriquer lui-même ses sucres, vit en symbiose avec une algue microscopique ou une bactérie (cyanobactérie) capable de les lui fournir. Cette algue ou cette bactérie effectue ce qu’on appelle la photosynthèse, une réaction biologique qui transforme le dioxyde de carbone en sucres et en oxygène grâce à l’énergie du soleil. En échange, le champignon est un véritable abri qui protège l’algue ou la bactérie et lui fournit l’humidité dont elle a besoin.

Sur la côte méditerranéenne, on trouve par exemple l’espèce Anaptychia runcinata, résultat d’une symbiose entre une algue du genre Trebouxia et un champignon ascomycète (une des grandes divisions de champignons).

Le lichen est donc le fruit même d’une association entre deux êtres-vivants.

Le secret de la Posidonie.

La Posidonie est une plante marine endémique de Méditerranée. Crédits : Licences Creative Commons. – Photo de Une : l’espèce de lichen Flavoparmelia caperata, le lichen vert commun. Crédits : Licences Creative Commons.

Plante marine emblématique de la Méditerranée, la Posidonie renferme de nombreux secrets à l’origine de sa prospérité. Là encore, c’est dans l’entraide que la réponse se trouve. Pour se nourrir, cette plante récupère les nutriments, présents dans l’eau et dans les sédiments, notamment l’azote et le phosphore. Cependant, elle ne peut assimiler l’azote gazeux, et c’est bien embêtant puisque c’est la forme d’azote majoritaire présente dans l’eau de mer. Heureusement, des bactéries, du nom barbare de Candidatus Celerinatantimonas neptuna, ont élu domicile dans ses racines. Ces organismes microscopiques sont capables de fixer cet azote gazeux, et de le transformer en une forme (ammonium) que la plante peut récupérer ! Et de manière tout à fait équitable, les racines offrent un abri, une protection aux bactéries. Nous avons de nouveau à faire à une coopération qui semble plutôt honnête !

Même les crevettes ont leur garde du corps !

La crevette pistolet, de son vrai nom Alpheus macrocheles en Méditerranée, a de grosses pinces lui permettant de creuser un trou pour le gobie. Crédits : Licences Creative Commons.

Une petite crevette (communément appelée crevette pistolet) et un poisson, le gobie, forment une équipe de choc pour survivre dans le milieu marin. Qui l’eut cru, ces deux-là ont passé un accord : tandis que la crevette creuse un trou pour s’y abriter, à l’aide de ses pinces volumineuses, le gobie monte la garde. En effet, la crevette pistolet est quasiment aveugle, ce qui l’empêche de voir les prédateurs ou les dangers à temps. Un garde du corps comme le gobie est donc un atout indispensable à sa survie. En contrepartie, elle accepte volontiers de lui offrir le logis, en partageant son refuge fraîchement creusé. En mer Méditerranée, on trouve notamment l’espèce de crevette Alpheus dentipes, et le gobie à bouche rouge Gobius cruentatus

Foyer contre service, décidément, nous n’avons rien inventé !

*L’URSCOP, Union Régionale des SCOP (Sociétés Coopératives) et des SCIC (Sociétés Coopératives d’Intérêt Collectif) de PACA et Corse regroupe 280 SCOP et SCIC du territoire et près de 3000 coopérateurs.