Les cultures maraîchères et les arbres fruitiers sont victimes de ravageurs, comme les punaises. Anciennes ou nouvelles venues, favorisées par le réchauffement climatique, elles sont dans le collimateur des chercheurs. Le point lors d’une conférence au Salon Med’Agri, en octobre à Avignon.
On la surnomme « la punaise diabolique ». Halyomorpha halys de son vrai nom est arrivée de Corée, de Chine ou du Japon. Depuis 10 ans aux USA et au Canada, ces ravageurs ont causé de fortes pertes de rendement. En Italie depuis 2012, Halyomorpha est présente sur tous les fruits, notamment les noisettes. En 2016, elle a dévasté certaines productions, mais pas en 2017. En France, on l’a trouvée en région parisienne, en Alsace et dans le Var mais principalement sur des plantes naturelles, assez peu dans les cultures, hormis sur des kiwis et des fraises sous tunnel.
Coordonner la lutte
« Elle n’est pas encore un ravageur majeur, mais on sait qu’elle a toutes les caractéristiques pour le devenir. Il faut trouver des solutions avant que cela devienne trop problématique », explique Alexandre Bout, entomologiste et chercheur à l’INRA-PACA, qui coordonne la lutte biologique contre les phytophages.
Car en Provence, les structures compétentes se sont mises en ordre de marche et travaillent ensemble. Le GRAB à Avignon, l’INRA donc, mais aussi le CTIFL (Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes), la FNAMS (Fédération Nationale des Agriculteurs Multiplicateurs de Semences), reçoivent le soutien d’Unicoque et également des stations expérimentales, des chambres d’agriculture et des lycées agricoles.
La piste de l’aménagement du milieu
« En bio, le système est plus résilient, il peut absorber les chocs mieux qu’en conventionnel » souligne Jérôme Lambion, du GRAB Avignon. La voie qu’a choisi le groupe de recherche, c’est celle de complexifier l’agrosystème afin de le rendre plus résistant, en rétablissant un certain équilibre. Par exemple en installant des bandes fleuries et des plantes-piège attractives pour les punaises. Ou pourquoi pas aussi des plantes répulsives, c’est le système « push and pull » !
Sur les parcelles d’études, pour 80 choux en culture, il a planté 8 plantes-piège, type moutarde brune ou colza. Mais on doit éviter qu’elles ne deviennent des nurseries à punaises ravageuses. Il faut donc aspirer les larves ou insectes toutes les semaines. Et pour les producteurs en conventionnel, ils peuvent alors traiter chimiquement les plantes piège, ce qui est toujours mieux que de traiter directement la plante cultivée !
Les outils physiques
Autre approche, les filets de protection qui ont certes fait leurs preuves. Mais en Provence, le Mistral les met parfois à mal. Et puis si le ravageur passe sous le filet, il passera la saison à l’abri et protégé de ses propres prédateurs !
Les ennemis de mes ennemis…
Alexandre Bout a choisi une autre piste. Il cherche à introduire des auxiliaires qui combattront les punaises phytophages. Ce sont les parasitoïdes oophages. Ainsi certaines micro-guêpes pondent dans l’œuf de ces dernières, et leurs larves s’en nourrissent. Fin brutale de la génération de ravageuses, il n’y aura pas d’adultes !
Problème avec Halyomorpha halys, espèce exotique : les punaises locales ne l’apprécient pas vraiment… Conclusion, il faut aller chercher des auxiliaires dans leur environnement d’origine.
Et là tout se complique et prend du temps, car la règlementation avant d’introduire une nouvelle espèce est –sûrement à juste titre- très stricte. Autorisation d’importation, quarantaine, multiplication des études notamment montrant que le nouveau prédateur s’en prendra au ravageur visé et à personne d’autre…
En attendant les résultats des uns et des autres, la connaissance générale avance, les bases de données grossissent, et certaines espèces même pas encore arrivées sont déjà sous surveillance !
Pour aller plus loin
Ces travaux sont actuellement conduits avec l’ensemble des partenaires dans le cadre du projet ECOPHYTO/CASDAR IMPULsE.
Collaboration également avec des équipes européenne (CABI suisse) et américaine (USDA – EBCL Montpellier) sur le sujet.
L’équipe Recherche et Développement en Lutte Biologique de l’Unité Institut Sophia Agrobiotech (Pôle Santé des Plantes) de l’INRA PACA, développe une expertise sur les parasitoïdes oophages dans un contexte de lutte biologique. Aujourd’hui cette expertise se traduit par l’existence d’un Centre de Ressource Biologique sur les Parasitoïdes Oophages nommé CRB Ep-Coll.