Il existe sur le territoire des structures dont la vocation est de prémunir de la grêle les terres agricoles, mais aussi les biens et les personnes. Comment cela fonctionne-t-il ?
Dans les Bouches-du-Rhône et dans le Vaucluse, c’est l’association Prévigrêle qui assure cette mission. Elle est rattachée à une association nationale créée dans les années 60, l’ANELFA.
Quinze territoires
Sandra Scavenne est la coordinatrice pour les Bouches-du-Rhône et le Vaucluse, ainsi que l’Ardèche, le Gard et la Drôme. Elle nous en explique le fonctionnement.
«Quinze territoires en France sont organisés autour de la prévention de ce phénomène météorologique. La lutte contre la grêle consiste à introduire artificiellement dans les nuages des noyaux glaçogènes d’iodure d’argent. De cette façon, le nombre de cristaux de glace augmente, et la dimension des grêlons se réduit. Ceux-ci tombent alors plus lentement et fondent en totalité ou en partie avant d’atteindre le sol ».
L’ensemencement : risqué ou pas ?
A la question « quels risques pour l’environnement ou les humains ? » la réponse ne se fait pas attendre. « Dès 1972, le découvreur de l’iodure d’argent, le physicien Bernard Vonnegut, s’est inquiété des effets possibles de cette substance sur la santé humaine. Dans les années qui ont suivi, plusieurs études spécifiques ont été réalisées. Il s’agissait de mesurer l’impact des substances glaçogènes artificielles dispersées dans l’atmosphère. Elles ont démontré l’innocuité des ensemencements en iodure d’argent sur l’environnement (voir plus bas*). Notre méthode est celle de l’utilisation de générateurs à vortex. Ils sont équipés d’une solution acétonique à 99% et d’iodure d’argent à 1%. La flamme générée par la combustion du mélange est envoyée à 2000 m d’altitude. Elle atteint ainsi la base du cumulonimbus, le nuage générateur de grêle. Les courants ascendants à l’intérieur du nuage dispersent les cristaux. Cette solution technique est à la fois moins chère et moins invasive que celle par exemple du canon à ultra-sons. Autre avantage, nos générateurs sont quasiment inaudibles ».
500 opérateurs bénévoles
Les départements du sud sont maillés et répartis en 4 zones distinctes. Quand un risque de grêle est avéré, les opérateurs sont prévenus grâce aux bulletins d’alerte. Ceux ci sont émis toutes les trois heures par le spécialiste du fléau atmosphérique, la société KERAUNOS. Et tous les générateurs de la zone concernée sont alors activés. Pas encore automatisée, la procédure demande une intervention humaine. C’est donc un réseau de plus de 180 générateurs tenus par près de 500 opérateurs bénévoles qui participe à cette surveillance. Sandra insiste sur l’esprit qui prévaut : solidarité et protection de tout un territoire.
Dans les Bouches-du-Rhône, un maillage distendu
L’efficacité est garantie par un maillage serré des générateurs. En effet les particules sont rapidement dispersées par les vents d’altitude. Il est donc essentiel que plusieurs machines fonctionnent en même temps pour protéger une surface la plus vaste possible.
Malheureusement, ce maillage est plutôt distendu dans les Bouches-du-Rhône. Pour améliorer la couverture, l’installation de nouveaux générateurs est une nécessité. Qui se heurte cependant à une réalité financière : celle du coût de location des générateurs, d’acquisition des produits, et de financement du suivi des équipements.
En recherche de partenariats financiers
Prévigrêle, ce sont 413 financeurs. La Région et les Départements des Bouches-du-Rhône et du Vaucluse, des intercommunalités et des communes. Mais aussi des groupements professionnels et des agriculteurs. 75% du budget, proche des 400 K€, est consacré au matériel. Sachant que les produits utilisés ont connu une augmentation de leurs coûts de près de 15% cette année. Sandra nous confirme que la situation financière de l’Association est fragile, et qu’il est essentiel d’en sécuriser ses ressources pour assurer sa survie. Trouver de nouveaux financeurs est une nécessité !
Trois salariés pour 5 départements
Trois personnes seulement oeuvrent au sein de Prévigrêle. Pour les 5 départements du Sud, deux techniciens sont en capacité d’intervenir. Ils ont en charge l’installation, la formation, la maintenance et le suivi des générateurs chez chacun des opérateurs. Quant à la coordinatrice, elle réalise l’étude préalable à l’installation de chaque nouvel équipement. Grâce à une expertise sur des sujets aussi divers que la connaissance du phénomène des orages, des vents, de la géographie qu’elle a acquise au fil de ses interventions. « Nous sommes tous passionnés par notre mission » conclut-elle.
(*) www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-question-du-jour/face-a-la-secheresse-l-ensemencement-des-nuages-peut-il-etre-une-alternative-2804694 – Interview de François Marie BREON, Physicien-climatologue, chercheur au Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, un des laboratoires de l’Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL), président de L’Association française pour l’information scientifique (Afis).