C’est en Haute Crau que le projet « Eau des Villes, Eau des Champs » a été initié. Un bel exemple de mise en relation d’acteurs du territoire, qu’ils soient agriculteurs, collectivités, associations d’arrosants ou citoyens. Un point sur cette réflexion collective était présenté en décembre.

Incontestablement, le citoyen veut aujourd’hui participer à la prise de décision sur des sujets qui lui sont chers. Le thème de l’eau est l’un de ceux-là, d’autant plus sur un territoire à ce point marqué par son usage séculaire. Un constat pour démarrer : la problématique de l’eau était mal connue, et il y avait encore beaucoup d’idées reçues sur son « gaspillage »… Les conditions étaient donc réunies pour réfléchir collectivement, formuler des orientations répondant aux préoccupations, et les décliner en actions réalistes.

Créer une dynamique citoyenne

L’un des enjeux de ce projet était la mobilisation des habitants de la Haute Crau, invités à participer à la réflexion. Les porteurs du projet ont donc arpenté les marchés et les manifestations locales pour aboutir à un groupe constitué d’une trentaine de personnes. Les plus motivées ont participé activement à tous les ateliers et autres rand’Eaux, apportant ainsi leur contribution de citoyen.

Impliquer les enfants

4 classes des hameaux de Haute Crau ont également participé au travail collectif. Elles sont allées à la rencontre d’un exploitant de foin, et ont surtout travaillé sur le circuit de l’eau en Crau. Mieux connaître les enjeux de sa gestion leur ont permis de réaliser en classe des expérimentations. Et chacune a produit une restitution sur un sujet différent. Création de panneaux d’exposition sur l’irrigation gravitaire, réalisation d’un diaporama, création d’une histoire inspirée par « l’homme qui plantait des arbres » de J.Giono .

Les classes de Haute Crau en action : rencontre avec un exploitant de foin de Crau @CPIE

300.000 habitants alimentés par la nappe de la Crau

Hydrogéologue de formation, Charlotte ALCAZAR, directrice du SYMCRAU, rappelle que la particularité de la nappe souterraine de la Crau est qu’elle est alimentée à 70% par l’eau d’arrosage des parcelles exploitées en foin de Crau. Mais consommée par plus de 300.000 personnes. La préservation de la ressource est donc l’affaire de tous !

Renouer le dialogue

Loin du cliché d’un antagonisme citadins/agriculteurs, ce projet avait également pour ambition de renouer le dialogue, de rapprocher des visions différentes sur un même sujet. La ressource doit être partagée, et ce dans les meilleures conditions possibles. Mais avant cela il s’agissait de remettre en perspective le pourquoi et le comment de son utilisation par les agriculteurs. Patrick LEVEQUE, président de la Chambre d’Agriculture des Bouches-du-Rhône le formule ainsi : « l’agriculteur utilise l’eau, il ne la consomme pas » ! Autre prise de conscience importante : la charge financière de l’entretien des canaux repose aujourd’hui exclusivement sur les agriculteurs.

Patrick Lévêque (Chambre d’Agriculture 13) : l’agriculteur utilise l’eau, il ne la consomme pas ! @PCarrier

Aux yeux de tous, un projet fédérateur

Pour le syndicat des arrosants, L’ASA d’irrigation de la Haute Crau, la sensibilisation des enfants a été un vrai succès. Avoir pu leur faire comprendre le chemin « de la terre à la table » et « de la source au robinet » est particulièrement gratifiant. Joanne MICHELUTTI, co-directrice du CPIE, animateur des ateliers, est très positive : «Pour nous, la mutualisation des compétences est une belle réussite. Grâce au co-portage par les différents acteurs, la vision de chacun s’est enrichie de celle des autres. »

Plusieurs pistes identifiées

63 actions identifiées se sont transformées en 17 préconisées. Il a été question par exemple d’imaginer une tarification différenciée de l’eau (déjà en vigueurs dans certains territoires). L’aménagement de sentiers de randonnées, aux abords des canaux d’irrigation, permettrait la découverte des paysages en lien avec l’activité de production.

Les Rand’Eaux : un moyen original de mieux comprendre les enjeux de l’eau en Haute Crau @CPIE

Pour aller encore plus loin, le sujet de la réutilisation des eaux usées aussi bien pour l’agriculture que pour le secteur urbain a été évoqué. La recherche de sobriété, la mise à disposition de récupérateurs d’eau pour les particuliers, la préservation de l’intégrité des canaux… Tous ces sujets parmi d’autres ont également été abordés. Enfin, pour conserver la dynamique collective citoyenne, une journée de nettoyage des canaux, voire la création d’une Fête de l’Eau ont été proposées. Cette journée pourrait correspondre à ce qui existait par le passé, la remise en eau des canaux. C’était était alors un véritable évènement populaire.

Et la suite ?

La table ronde qui a clôturé la restitution du travail effectué depuis 2023, réunissait des citoyens, le SYMCRAU et la CCAACCM. Tous partagent le souhait de poursuivre, en mettant en œuvre les actions qui ont été retenues au cours des différents ateliers de travail. Cette année d’échanges a permis d’expérimenter les modalités de participation citoyenne autour des enjeux de l’eau. Mais aussi d’initier une réflexion autour d’actions structurantes sur le territoire de la Haute Crau. Restera à mobiliser de nouveaux financements, en élargissant en outre le périmètre sur toute la communauté d’agglomération ACCM. Cette première étape a été financée par l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse.