Parfois « Babylone déconne », disait Bill Deraime, mais ici, sur l’île de Santo Antão au Cap Vert, ce restaurant est le fruit d’un projet sérieux de développement local, où l’agriculture villageoise, bio par essence, est valorisée à l’attention des touristes.
« C’est une maison blanche adossée à la colline, on y vient à pied, on ne frappe pas… ». Les paroles de Maxime Le Forestier auraient pu être écrites pour Babilónia que n’en n’aurions pas été surpris. Bienvenue sur l’île de Santo Antão, la plus atlantique de l’archipel du Cap Vert. La plus belle, aussi, avec son relief montagneux volcanique et ses vallées luxuriantes. Sur la route de l’ouest entre Porto Novo et Alto Mira, au village nommé Lajedos, l’on pourrait y passer cent fois que le restaurant resterait toujours invisible. Anonyme. Sans aucun panneau de signalisation. Une maison blanche, oui, posée sur la colline, oui, où l’on vient en effet à pied en ce jour d’octobre car les pluies torrentielles ont détruit le chemin d’accès, quelques jours auparavant.
Omolete recheado, puré d’inhame
La salle est rustique, tables et chaises en bois ; les murs nus sont en pouzzolane, une roche légère d’origine volcanique ; sur un petit buffet sont présentés rhums, cafés, condiments et confitures locales ; au mur, une ardoise indique les plats du jour, tchuk na banha, omolete recheado, puré d’inhame… ; dehors enfin, une grande terrasse domine la vallée, à travers les plantations. Surtout, surtout, une odeur aigre-douce exquise s’échappe de la cuisine, où Joana et Tamasia (aux yeux verts magnifiques !) s’affairent. A table ! Ce midi-là, nous dégusterons manioc, patate douce, côtelettes de porc, poisson de la côte (toute proche), sauce papaye, jus de mangue frais… servis avec le sourire gracile de Miriam.
Quartier artisanal
Babilónia n’a rien d’une gargote commune. En effet ce restaurant étonnant est le résultat d’un projet de développement local de valorisation des produits agricoles du village. D’abord initié par un ancien ministre de la culture cap-verdien – rappelons que l’archipel est le berceau de Cesária Evora, la musique irrigue la quotidien des habitants – puis relayé par les villageois. L’idée simple est de transformer au profit des touristes une partie de la petite production
vivrière afin d’améliorer le quotidien des paysans, qui y trouvent un canal de distribution supplémentaire.
En prime, le projet s’est accompagné de la création d’un quartier artisanal où les petites mains locales vendent dans des échoppes communales vannerie, sculptures et textiles. Et une résidence d’artistes complète le projet. Au final, tout le monde est censé trouver son compte dans cette initiative qui crée du lien entre les habitants et les visiteurs. Mais de grâce, de grâce, amis de Lajedos, mettez un panneau sur la route pour que les visiteurs véhiculés ne manquent pas cette adresse insolite et réconfortante.
Babilónia
Lajedos – Porto Novo