La petite soixantaine, Mireille Lambertin se présente comme citoyenne, fille de paysans et médecin dans le Vaucluse. Présidente de l’asso Foll’Avoine qui lutte contre les OGM et les brevets sur le vivant, elle est aussi faucheur volontaire et membre de l’association Sciences Citoyennes.
1/ Pourquoi l’agriculture est-elle le champ principal de vos combats ?
« Bien que fille de paysan, je ne suis pas partie de l’agriculture mais de la santé. C’est en tant que médecin que j’ai été alertée par l’évolution des maladies. Je me suis demandée ce qui se passait. A l’instinct, je suis partie au Larzac, début des années 2000, avec le mot « alternatif » qui me sonnait aux oreilles… Au fil des rencontres, je suis passée de la santé à l’alimentation et à l’agriculture. De la santé humaine à celle des plantes et des animaux. J’ai fait le chemin à l’envers ! Et je me suis engagée avec les Faucheurs Volontaires. »
2/ Vous êtes poursuivie pour deux fauchages, de la vigne à Colmar et du colza près de Dijon. Jusqu’où êtes-vous prête à aller pour défendre vos idées ?
« Au début j’ai eu très peur. Mais avec les faucheurs, on est dans le groupe, et sur la non-violence. Ceci dit, partout où je vais, dans les colloques scientifiques par exemple, je me fais remarquer. Je pose les questions qui dérangent. Sur la santé, les OGM, ou la biodiversité, la société. Par exemple, est-ce que les scientifiques ne devraient pas arrêter de chercher ? Aujourd’hui, avec l’informatique, la recherche connait un coup d’accélérateur énorme, on ne maîtrise plus rien. Est-ce qu’il ne faudrait pas s’arrêter et réfléchir ? Alors parfois des gens viennent me voir à la fin, et me félicitent. Dommage qu’eux-mêmes ne s’expriment pas à leur tour ! Mais cela me donne le sentiment que je porte la parole d’autres personnes. »
3/ Quel bilan tirez-vous de ces années de combat ?
« Je ne me pose pas la question de l’optimisme ou du pessimisme. Je fais ce que j’ai à faire. Au moins je suis en accord avec moi-même. Si chacun s’engageait à son niveau… La nature était là avant nous. Quel sens a de vouloir la transformer à tout prix ? Il faudrait lui apporter –ainsi qu’au vivant- toute notre attention. Alors oui j’en veux aux scientifiques et aux politiques. L’Etat a oublié sa fonction qui est de protéger toute la société, pas que les entreprises ! Il est temps de remettre en avant les vraies valeurs : l’humanité, l’amour, le partage. Et de regarder au-delà de notre seule génération ! Non, ma bagarre n’est pas pessimiste. »