So good Festival septembre 2023 la Friche de la Belle de Mai

Pour sa première édition le 15 septembre, le So good Festival a choisi Marseille et la Friche de la Belle de Mai. Cet objet non identifié porté par le groupe media « So good » entendait mêler genres et publics, concerts et témoignages engagés pour la planète. Récit de la journée.

Comme toute première, la manifestation est en rodage. La Friche de la Belle de Mai est vaste, les propositions nombreuses, et malgré les panneaux d’info, repérer celle que l’on cherche n’est pas facile. Mais à force de monter, descendre, parcourir des espaces ouverts et traverser des bâtiments, on finit par trouver…

Ici, des centaines de personnes attelées à une gigantesque fresque régénérative, là des adeptes de la grimpe et de la reconnexion avec les arbres. Plus loin un cours de yoga, ailleurs une chorégraphie en pleine construction, ou encore l’enregistrement public d’une émission de So good Radio. On s’y pose…

Plan du déroulement du So good Festival

Un bel effort avec les panneaux d’info, mais la Friche est vaste… ©JB Photo de Une : La Friche de la Belle de Mai en fleurs et en béton ©JB

Pollution de la mer et plastiques

L’occasion d’entendre Nelly Pons, autrice de plusieurs ouvrages dont « Océan Plastique » et « Déplastifier sa vie », (Bleu Tomate en avait parlé à sa parution, voir les articles ici et là) et Rosalie Mann, fondatrice de l’association No More Plastic. Nous voilà pile dans l’un des thèmes du festival, la préservation des milieux côtiers (l’autre est l’éducation).

Comme toujours, la discussion part d’un constat accablant. « Il faut savoir que seulement 1% des déchets plastique flottent, rappelle Nelly Pons. Le reste plonge dans les fonds sous-marins, s’échoue sur les côtes ou se décompose en micro ou nano-déchets qui vont contaminer toute la chaîne alimentaire ».

« Recycler le plastique, c’est recycler du poison »

Rosalie Mann enfonce le clou. « Le problème principal du plastique est sa toxicité. Les objets larguent en permanence des particules chimiques nocives, en particulier pour les enfants et les femmes. Et encore plus quand le plastique est recyclé ». Pour la jeune femme, le recyclage n’est donc absolument pas une solution, il est à proscrire ! « C’est une bombe » affirme-t-elle.

Radio So good en enregistrement à la Friche de Mai

Enregistrement d’une émission de Radio So good à la Friche ©JB

Des solutions, vite !!!

La fondation No More Plastic prône certes le ramassage des déchets –en prenant des précautions-  mais ensuite leur éradication pure et simple. « Si l’on arrêtait seulement avec les emballages et le textile, on règlerait plus de 50% de la production de déchets plastiques », explique Rosalie Mann.

Elle évoque également la technique des enzymes qui les digèrent. Une découverte qui fonctionne très bien en laboratoire et pourrait être utilisée dans des usines, selon elle. La solution passe par la mise en place d’autres circuits que le recyclage, des lois pour interdire par exemple les jouets recyclés et qui prennent en compte la dangerosité des objets recyclés. Et bien sûr le financement  de recherches nouvelles.

Rosalie Mann (à gauche)et Nelly Pons (à droite) se sont rencontrées au So good Festival ©JB

« Déplastifier sa vie »

Pour Nelly Pons, il s’agit de changer de paradigme. « On perd des années avec le recyclage qui ne sert à rien sauf à culpabiliser le public. Il faut déplastifier sa vie, poursuit l’autrice. Pour cela, une plus grande compréhension est nécessaire. Notre civilisation est plastique parce que c’est celle du jetable. La première chose à faire est de questionner notre rapport au monde, au vivant et s’occuper de sa santé. Par exemple en faisant le tour de sa salle de bain, ou des emballages alimentaires ».

Bref, les deux intervenantes appellent à un changement de société « enthousiasmant, joyeux et écologique ». Mais qui ne passera pas seulement par des actions individuelles.

Et à part la pollution ?

Et notre Méditerranée dans tout ça, comment se porte-t-elle ? La question est posée à Pierre Boissery, expert mer à l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse. Juste avant son intervention dans une rencontre dans le cadre du So good Festival.

Pierre Boissery expert eaux côtières et littoral méditerranéen ©Andromède_oceanologie

« Elle va mieux que ce que les gens pensent », affirme l’expert. Qui rappelle les propos de Jacques-Yves Cousteau à la tribune des Nations Unies en 1966 : « Dans 10 ans, la mer Méditerranée sera morte » ! Mais si elle n’est pas morte 6 décennies plus tard, c’est « parce qu’on a bossé » ! précise Pierre Boissery.

Etudier, proposer, financer

Parmi les mesures prises, la création des stations d’épuration et des réserves marines, l’amélioration des connaissances, la sensibilisation des décideurs et l’aide apportée, y compris financière… Alors certes, la Méditerranée n’est pas en super forme, mais poursuit le chercheur, « si on a évité le pire il y a 40 ans, on doit y arriver aujourd’hui ».

C’est en tout cas ce à quoi s’emploie l’Agence de l’Eau régionale qui consacre 100 millions par an à la mer (et 400 millions à l’eau douce). « L’agence c’est comme un médecin : elle établit un diagnostic et prescrit le traitement, et comme la Sécurité Sociale, elle le finance. Mais ensuite, il faut que le patient le prenne… »

herbier de posidonie transplanté

Transplantation d’herbien de posidonie ©andromède_océanologie

Convaincre d’agir ici et maintenant

 « La plupart du temps, on a la connaissance du problème, la solution et le financement. Si on doit progresser, c’est dans la volonté de faire mieux.  La gestion des milieux se fait à moyen et long terme, mais il faut la mettre en place aujourd’hui quand même », affirme Pierre Boissery.

Sauf que les progrès se voient souvent au bout d’une dizaine d’années, voire davantage, et  que le temps de la mer n’est pas toujours celui des décideurs…

Arrêtez de jeter l’ancre !

Aujourd’hui, au-delà de la pollution qui parait reculer, le problème le plus vif est celui de la destruction des habitats. En cause, les aménagements et les usages humains. Principalement près des grandes concentrations de population et d’activités, comme Fos/Marseille, Toulon, Cannes, etc…

trace d'ancrage dans la posidonie

Trace d’ancrage dans l’herbier de posidonies ©andromède_océanologie

Parmi les solutions, les réserves, à condition que les règlements et prescriptions y soient vraiment respectés. Et les zones de mouillages d’équipements légers (ZMEL). Dans ces endroits particulièrement fragiles, des bouées spécifiques permettent aux bateaux de s’amarrer sans jeter l’ancre dans les herbiers de posidonies. Pratique qui détruit ces milieux protecteurs de la faune marine. « Vous ne coupez pas 3 arbres pour garer votre voiture », s’insurge l’expert. Trois ZMEL existent (à Cavalaire et en Corse) et une quinzaine est en projet.

Des maisons pour les poissons

Autre axe, la réparation des nurseries, grâce à l’immersion de structures métalliques qui constituent des petits récifs sur lesquels la vie va reprendre et les poissons revenir frayer.

Et puis il y a les nouveaux terrains d’étude, comme les travaux sur l’acoustique ou encore l’ADN environnemental (ADNe). Des prélèvements dans l’eau permettent de caractériser le milieu, et de savoir qui était là, même s’il n’y est plus. Cet été, une grande campagne de prélèvements a été conduite sur tout le littoral méditerranéen français plus la radiale Nice Calvi. Avec 880 points d’inventaire, c’est le plus important prélèvement réalisé au monde.

Récifs artificiels

Exemple de restauration écologique ©ecocean

Sensibiliser tous les publics

Pierre Boissery partage son temps entre le bureau, le terrain – plus précisément le littoral et ses fonds sous-marins- et la rencontre de différents publics pour diffuser les connaissances sur l’état de la mer et les actions à mener pour améliorer sa santé. D’où sa présence au So good Festival.

« L’approche positive et festive est intéressante, je suis persuadé qu’il faut sortir de nos cadres, de nos bureaux, aller à la rencontre d’autres personnes, d’autres situations », conclut-il. Et surtout délivrer un message positif.

entrée du So good Festival

Une journée au So good Festival permet des dizaines de rencontres, d’activités et d’échanges ©JB

Mission accomplie. Allez, on en a plein les pattes, on retourne à la gare (on n’allait pas venir au So good Festival en voiture, quand même…). A la Friche, les artistes vont bientôt entrer en scène… Mais c’est une autre histoire !

La fondation logo NO MORE PLASTIC s’entoure de scientifiques et vulgarise les résultats de leurs recherches. (par exemple sur les effets sur la santé de la chimie du plastique). Elle  diffuse les résultats auprès d’ONG, d’Etats, d’industriels par le moyen de revues, livres, conférences, Réseaux Sociaux ou encore interventions dans les écoles et Universités…

So Good Festival

Montée en quelques mois par le groupe media engagé So Good en partenariat avec la MAIF, la manifestation se veut « engageante et engagée ». Outre un plateau d’artistes parmi lesquels Izia et Eddy de Pretto, des personnalités engagées dans l’écologie positive – de Rob Hopkins à Cyril Dion en passant par Camille Etienne – sont invitées à partager expériences, témoignages et engagements avec un public divers.

A la Friche de Mai atelier

Un des multiples ateliers du So good Festival, ici il est question de démocratie participative ©JB

Un festival qui surveille son impact écologique, (menu végétarien pour les food-trucks présents), reverse la recette à des associations locales et fait toute leur place aux personnes handicapées et au public jeune aux maigres ressources.

Bref un festival à l’image du groupe media qui le porte. Son objectif ? Mettre en avant les initiatives positives face à la crise climatique et à la fracture sociale. Le groupe édite un magazine papier et anime une radio.