C’est à une zone pâturée en Camargue par les taureaux de la manade DI AMISTA qu’a été attribué le 1er prix du Concours Général des pratiques agro-écologiques, catégorie Pâturage exclusif. Il a été remis lors du Salon International de l’Agriculture en février 2022.
Des pratiques agro-écologiques sur la parcelle de l’Etang des Gazes
Cette parcelle présente une gestion typique et traditionnelle des marais camarguais. Et c’est parce qu’elle combine propriétés agro-écologiques et usage agricole que cette parcelle a obtenu le premier prix du Concours Général.
Pour répondre aux critères du jury, la parcelle candidate doit présenter un équilibre idéal entre environnement et rendement. En fait, l’évaluation de cet équilibre agro-écologique repose sur une méthode d’observation de la végétation simple. Cette méthode a été construite avec l’Institut National de la Recherche pour l’Agriculture l’Alimentation et l’Environnement (INRAE).
Préservation de la biodiversité et qualités nutritives de la prairie
Le pâturage raisonné pratiqué sur cette parcelle favorise le développement d’espèces végétales patrimoniales floristiques et faunistiques. Certaines d’entre elles sont d’ailleurs protégées en Camargue et au niveau national (Orchis à fleurs lâches, la Diane).
Le site est alimenté en eau par une nappe d’eau douce et un réseau de canaux. Il offre un endroit nourrissant pour faire pâturer les vaches de la manade et leurs veaux. Cet « Ilot de fraîcheur » permet à l’agriculteur d’y élever une petite partie de son cheptel à l’année en toute autonomie.
Entre zone d’activité portuaire et parcelle pâturée
Les terrains font l’objet d’un bail entre la manade DI AMISTA et le Grand Port Maritime de Marseille (GPMM). Riche de sa diversité, cette parcelle est située en zone de Crau humide. Elle recèle des marais temporaires, des prés salés, des pelouses sèches et des roselières. Oiseaux, insectes, petits mammifères, batraciens et reptiles complètent la richesse florale du lieu.
Aucune intervention humaine sur les 50 ha de cette parcelle, entre zones pâturables et marais. « Tous les ouvrages de cette parcelle nous viennent des anciens. Ils savaient comment optimiser la richesse de ses sols et de ses espèces végétales. A nous de respecter et maintenir le fruit de leur travail ! ». Guy Vossier s’occupe à plein temps et avec passion des 50 bêtes pâturant sur cette parcelle. « Ici c’est comme une maternité, avec les mères et leurs veaux. Ils ont de l’eau à volonté, de l’ombre, de la nourriture. Et ils ne détruisent pas le marais comme le feraient des taureaux ».
Le Grand Port Maritime de Marseille partenaire engagé de la préservation de la biodiversité
Le GPMM va plus loin que l’obligation qui est faite aux zones portuaires. Il a organisé en interne une équipe entièrement dédiée à cette mission. 5 personnes (chargée de mission et éco-gardes) garantissent la bonne application de ses engagements. La création d’une couronne agro-environnementale et d’un plan de gestion, destinés à préserver la biodiversité comme de maintenir l’activité agricole, sont une réalité depuis 2009. La zone protégée couvre 2600 ha (dont une partie de la Réserve de la Crau). Et la tendance est à l’extension de cette zone avec la réhabilitation de certains secteurs.
Eviter, Réduire, Compenser. De fait la doctrine de l’ERC est une obligation réglementaire qui s’impose à tous les projets d’aménagement. « Nous travaillons avec les exploitants agricoles à partir d’un cahier des charges précis. Par exemple le manadier partenaire doit s’engager à éviter le surpâturage et pratiquer la rotation des cultures. Notre préoccupation est aussi d’anticiper les futurs aménagements en privilégiant les couloirs de biodiversité. Il est évident que les grands ports ont une vraie responsabilité dans la préservation des espaces naturels. » explique Jérémie Solère, assistant chargé de mission Biodiversité du GPMM.
Une zone à préserver, en continuité avec la Camargue
On pourrait cependant s’interroger sur les conséquences écologiques de la proximité d’aménagements portuaires. Stéfan Arnassant, chargé de mission en biodiversité du Parc Naturel Régional de Camargue, nous rassure. « Vu d’avion, il est évident que l’environnement est très industriel, que la pollution aérienne existe. Mais bien que fragmentées, ces terres préservent leur valeur écologique. Et ces parcelles sont en continuité directe avec la Camargue, avec les connexions hydrauliques des multiples canaux ».
Le Concours des Pratiques Agro-écologiques Prairies et Parcours
Le Concours des Pratiques Agro-écologiques Prairies et Parcours (anciennement Concours des prairies fleuries) a été créé en 2010, à l’initiative des Parcs Nationaux de France et des Parcs Naturels Régionaux de France. Ils sont rejoints en 2013 par les Chambres d’agriculture pour accompagner l’ouverture du concours à l’ensemble du territoire national. En 2014, la démarche franchit une nouvelle étape, en intégrant la grande famille du Concours Général Agricole.
La Camargue fortement impliquée
Depuis 2010, le Parc naturel régional de Camargue et le Syndicat de la Camargue Gardoise organisent le Concours sur le territoire de la Réserve de biosphère de Camargue. Ce concours concerne tous les éleveurs qui valorisent des pâturages et des prairies de fauche non semées, riches en espèces, afin d’en tirer le meilleur profit dans l’alimentation des troupeaux. Le prix obtenu par la manade Di Amista est une juste reconnaissance de cette implication : plus de 45 éleveurs ont ainsi participé ces dernières années dans l’une ou l’autre des catégories du Concours Général Agricole.
Sélectionné par un jury local pour être présenté au Concours National
Composés de personnalités issues du monde de l’environnement et de l’agriculture (agronomes, botanistes, experts faune et flore, apiculteur), ce jury présidé par Régis Vianet se prononce à la fois sur la richesse du milieu et sur les pratiques de l’éleveur. Ces regards croisés sont pour ce dernier une belle opportunité. Ils lui permettent d’identifier les forces et faiblesses de sa parcelle, et de bénéficier d’un véritable inventaire de celle-ci.