Depuis 3 ans, cette agricultrice installée à Vénasque (84) préside la Chambre d’agriculture du Vaucluse. Son objectif ? Pérenniser au maximum une agriculture qui réponde aux défis actuels : crise climatique et souveraineté alimentaire. Cela en lien avec la société civile.
Elle est fille d’éleveur et a épousé un arboriculteur. Mais elle a tenu à suivre une formation pour « gagner sa place sur l’exploitation », située au pied du Ventoux. 15 ha de cerisiers, oliviers, vigne et aujourd’hui des pistachiers en expérimentation. Rapidement, elle a créé une ferme éducative « pour transmettre sur le métier, les réalités du quotidien et surtout les partenaires autour de l’exploitation », précise-t-elle.
Madame la Présidente
Engagée à la Chambre d’agriculture du Vaucluse de longue date, elle est la première femme à la présider. « J’ai pris conscience très vite que le changement climatique aurait un impact sur l’agriculture, explique Georgia Lambertin. On se doit d’accompagner les agriculteurs, en partant de l’innovation et de la recherche. Il n’y a pas une seule solution, mais un panel et chacun doit trouver celles qui conviennent le mieux à ses productions ».
Dans un département, traditionnellement dédié à la polyculture, les atouts sont nombreux pour protéger la biodiversité. Beaucoup de labels et de signes de qualité, 21% des fermes en Agriculture biologique. Et une volonté affirmée, notamment à travers les stations expérimentales qui travaillent par exemple sur les variétés anciennes à préserver et nouvelles à développer pour mieux s’adapter, et les diverses techniques pour protéger les vignes du soleil et de la chaleur.
La Chambre accompagne aussi les agriculteurs dans leur bilan carbone, et le choix de solutions vertueuses dans leurs modes de culture. Et elle soutient les GIEE, (Groupement d’Intérêt Economique et Environnemental), Ventoux Durable par exemple, et l’initiative Couverts végétaux, toutes initiatives qui s’inscrivent dans des pratiques durables et protectrices de l’environnement.
L’eau à la base de la vie
Autre question, primordiale, celle de l’eau. « Nos anciens ont su nous protéger avec le système d’irrigation, grâce à la Durance et au Verdon notamment. Mais on arrive à un tournant, on doit réfléchir non seulement pour aujourd’hui mais aussi pour les prochaines années, afin que tous puissent avoir accès à l’eau. Et on ne peut pas travailler tout seul dans son coin, affirme la présidente. Cela doit se faire avec tous les partenaires concernés, pas seulement entre agriculteurs. La Chambre doit ouvrir ses horizons pour assurer la sécurité alimentaire et protéger les citoyens ».
Pour Georgia Lambertin, c’est un peu le secret d’une agriculture durable. Celle qui permet au monde agricole de vivre décemment de son travail, mais qui ne fonctionne pas toute seule. Et qui est consciente « du rôle à jouer au niveau de l’environnement ». Un discours pas toujours facile à tenir, mais qui semble faire son chemin.
« Le rôle de l’élu, c’est d’aider à la prise de conscience et d’apporter un soutien. Mon rêve serait de toucher 99% des agriculteurs, les informer que des solutions existent, les accompagner à prendre les bonnes décisions. Malheureusement, nous ne touchons pas tout le monde », regrette Georgia Lambertin.
Chacun doit faire un pas vers l’autre
Face à une société qui s’inquiète pour sa santé, et réclame –à juste titre selon elle- des produits de qualité, la responsable agricole attend en retour des citoyens qu’ils accompagnent aussi l’agriculture et jouent le jeu. Par exemple, en privilégiant l’achat des produits locaux et en reconnaissant le métier d’agriculteur.
Enfin, pas d’agriculture durable sans terres… Dans la région en particulier, la question du foncier se pose de façon cruelle. « La Chambre donne un avis sur les PLU,(Plan Local d’Urbanisme) le SCOT, (Schéma de COhérence Territoriale) et s’oppose aux projets qui mangent les terres agricoles, mais ce n’est qu’un avis consultatif », se désole la présidente. « Quand vous voyez dans les départements voisins, les inondations, les incendies… La chambre ne peut pas rester sans réagir face à ces fléaux. En protégeant l’agriculture, on protège l’avenir de tous ».
Et pas question de baisser les bras, face aux difficultés. L’agricultrice sait que son travail est de longue haleine.
« A travers la pandémie, la guerre à nos portes, le changement climatique (voyez l’Inde et la éècheresse qu’elle subit), je reste confiante. Je me dis que dans les prochaines années, l’agriculteur retrouvera sa place, non seulement comme acteur économique mais aussi comme celui qui subvient aux besoins de la société ».
Face aux pressions de la société et à l’urgence climatique, Georgia Lambertin trace sa route avec « humilité » dit-elle, sans donner de leçons. Mais dans le respect et la concertation.