Valeur montante auprès du grand public, ce concept de séjours mêlant quête de nature, de sens et de partage, s’est trouvé exacerbé après la crise du Covid-19. En Région Sud, il mobilise professionnels et institutionnels autour de la structuration d’une offre… pas encore tout à fait homogène.
Tourisme responsable, durable, de nature, écologique, écotourisme… les termes foisonnent pour nommer cette « nouvelle » forme de tourisme considéré plus vertueux et respectueux des hommes et de l’environnement. Cette profusion d’appellations témoigne toutefois de la difficulté d’en cerner précisément les contours, et la région Sud n’échappe pas à ce travers.
Egards envers la nature
Le tourisme de pleine nature serait-il ainsi nécessairement « responsable », pour la simple raison qu’il se déroule au grand air et est pratiqué par des personnes a priori plus attentives aux espaces qu’elles fréquentent ? La surfréquentation de sites (Gorges du Verdon, Massif des Calanques, voire Sainte-Victoire) montre hélas que l’outdoor n’est pas toujours synonyme d’égards envers la nature. Déchets, érosion des sols, embouteillages, problèmes de stationnement… soulignent à l’inverse ses effets néfastes. Par ailleurs, et pour ne citer que cet exemple, les nombreux parcours accrobanches créés en région ces dernières années peuvent-ils être considérés comme du tourisme responsable ? C’est peu probable.
Expériences immersives
Deuxième écueil : qui est dépositaire de l’écotourisme ? Les prestataires accueillants, parce qu’ils conçoivent des offres durables et imaginent des prestations autour de mobilités douces, de rencontres avec des producteurs locaux, de randonnées naturalistes… ? Ou les visiteurs, parce qu’ils recherchent des expériences immersives différentes, fuyant un tourisme de masse hyper consommateur et détaché des réalités locales ? A la réflexion, l’écotourisme est un peu le point de rencontre entre ces deux visions. Une forme d’entre-soi qui réunirait hôtes et clients dans une même envie de partage, de quête de sens et de connaissance du territoire, avec le respect de l’autre en toile de fond.
Plus de 900 produits et services écotouristiques dans les Parcs
Troisième écueil : comment quantifier l’offre si la définition n’est pas claire ? A ce stade, et sauf erreur de notre part, il n’existe pas d’observatoire de l’écotourisme en Région Sud. Ni d’études sur son poids économique. Les seules statistiques disponibles sont celles des Parcs nationaux et des parcs naturels régionaux. « Nous avons 550 entreprises engagées dans la labellisation autour des marques Valeurs Parc des parcs régionaux et Esprit Parc des parcs nationaux. Elles valorisent des prestataires attachés au territoire, ayant une forte dimension humaine et le souci de valoriser les patrimoines. A fin 2021, cela représentait 900 produits et services écotouristiques », éclaire Laure Reynaud, animatrice du contrat de filière régionale écotourisme, porté par la Région, et par ailleurs coordinatrice « Tourisme durable » pour les Parcs naturels régionaux du territoire. Parmi ces produits et services, on trouve des guides naturalistes, des sorties et des découvertes, des restaurants locavores, des ateliers cuisine, des séjours packagés…
60% d’espaces naturels en région
Le Comité Régional du Tourisme (CRT) a délibérément choisi les Parcs comme support au développement de l’offre écotouristique. Avec un argument de poids : les quatre Parcs nationaux (Ecrins, Mercantour, Calanques, Port-Cros) et les neuf Parcs naturels régionaux (dont les deux derniers, le Ventoux et la Sainte-Baume), représentent, en y ajoutant les Grands Sites de France et d’autres espaces naturels, 60% de la superficie de la région. Un record en France !
Marques Valeurs Parc, Esprit Parc, Clef Verte, Ecogite…
« Une offre écotouristique doit porter une qualification, comme Valeurs Parc, Esprit Parc, ou bien Clef Verte, Ecogite, Ecolabel européen… Mais elle doit aussi inclure une notion de territorialité et s’inscrire dans un espace naturel protégé », confirme Laure Reynaud. Oui mais et les 40% restant, alors ? Est-ce parce que des prestataires n’ont pas la chance d’être dans le périmètre d’un parc qu’ils ne pourraient pas eux aussi être porteurs d’une offre de tourisme durable ? On pense ici aux propriétaires des gîtes et chambres d’hôtes d’Une Campagne en Provence, un hébergement de Bras (Var) qui mise beaucoup sur l’écotourisme. Ils ont développé plusieurs circuits vélos et même aménagé une ombrière avec des panneaux photovoltaïques pour recharger vélos et voitures électriques.
Professionnels locaux demandeurs
La Région a semble-t-il conscience de ce travers. « Une réflexion est menée depuis l’année dernière pour élargir le contrat de filière et embarquer le reste du territoire dans la démarche », indique l’animatrice. Dont le rôle est de mettre l’offre en musique, de stimuler des projets innovants et d’accompagner les acteurs. « La marque Valeurs Parc des PNR est de plus en plus identifiée par les professionnels locaux. Ils sont demandeurs. (…) Nous leur proposons donc des formations spécifiques, comme récemment ce webinaire sur les économies d’énergie ». Pour mieux sensibiliser les acteurs du tourisme, les parcs, en lien avec la Fédération Régionale des Offices de Tourisme, proposent aussi aux adhérents de cette dernière, depuis fin 2020, une formation d’animateur écotouristique.
Week-ends écotourisme dans le Mercantour
L’étape « commercialisation des offres », elle, est entre les mains d’opérateurs partenaires spécialisés, dont c’est le métier. Escursia, spécialiste des voyages naturalistes, vend ainsi des séjours écotouristiques dans les parcs du Luberon, des Alpilles, du Verdon, de Camargue… Allibert Trekking fait de même dans le Queyras, le Mercantour, les Calanques… Dans le Parc national du Mercantour, une association, Mercantour Ecotourisme, réunit des socio-professionnels. Ils conçoivent eux-mêmes des week-ends écotourisme à destination des habitants et des visiteurs. Les neuf parcs naturels régionaux viennent d’éditer la version 2022 d’un « guide des séjours Valeurs Parc ». Il recense près de 20 produits conçus par ces agences spécialisées.
« Promo » et « com » à la charge du CRT
Quand à la communication et la promotion, elle est du ressort du CRT. Un site Internet dédié, ecotourisme.provence-alpes-cotedazur.com, valorise les expériences et idées de séjours en espaces naturels. Il est relayé par les Agences départementales et les offices de tourisme. Eux aussi qualifient des offres écotouristiques sur leur territoire et les partagent sur une plateforme on line, nommée APIDAE. Le CRT communique également auprès des opérateurs de voyage extérieurs sur les dernières nouveautés écotouristiques.
Transition touristique
Le grand public, lui, est sensibilisé par des campagnes publicitaires. Le CRT a ainsi produit un film « vitrine » pour promouvoir l’écotourisme dans les Parcs. Il a décliné par ailleurs son slogan « On a tous besoin du Sud » autour de la protection et du respect de la nature. Abribus, TER et médias régionaux l’ont amplement relayé.
S’il veut s’imposer comme une force crédible, l’écotourisme en région Sud n’échappera pas à une forme d’harmonisation des offres et des messages. De plus en plus de touristes souhaitent donner du sens à leurs séjours. De nombreux professionnels ont envie d’accueillir « autrement ». Avec ses atouts naturels et patrimoniaux incontestables, la Provence a toutes les cartes en main pour réussir cette transition touristique.
Pour en savoir plus
Vidéo « filière écotourisme CRT » : https://youtu.be/sUwuKShGi0A