Sauve qui poule se mobilise pour l'élevage de plein air

Loin des allées du Salon de l’agriculture à Paris, dans les campagnes, des paysans ouvrent leur ferme au public et aux élus. Objectif ? Montrer leur travail, leur passion et leurs difficultés. Ce jeudi, chez un jeune maraîcher-éleveur de Pernes-les-Fontaines (84), les volailles de plein air étaient au menu.

Naël Koudci a repris une ferme il y a deux ans, après une carrière comme ingénieur en génie civil. « Pendant 4 ou 5 ans, avec ma compagne, nous avons cherché une autre voie. C’est l’agriculture, qui cadre avec nos valeurs, »explique tranquillement le jeune maraîcher.

Deux serres et bientôt une troisième, 6000m2 de cultures en agroforesterie. Chaque petit jardin est entouré de haies de pommiers, pruniers et abricotiers. Juste à côté, une forêt. Ici, Naël bénéficie d’une biodiversité naturelle qu’il conforte en n’utilisant aucun traitement. Il vend principalement sur les marchés et aussi dans plusieurs boutiques locales.

Sauve qui poule soutient les éleveurs de plein air

Naël Koudci présente sa ferme, maraîchage en agroforesterie et petit élevage de volailles ©JB

Des poules toujours confinées

Le jeune agriculteur serait  heureux si ses 600 poules ne devaient rester enfermées, depuis qu’en novembre dernier le confinement des volailles a été décidé, pour cause de grippe aviaire.  « Ca me fait mal au cœur d’avoir 6000 m2 de parcours extérieurs qui ne servent à rien. Même si dans le bâtiment de 250 m2, bien ventilé, elles ont de la place [ndlr : pour cette surface, la réglementation l’autorise à 1500 poules], ce n’est pas génial ! » se désole l’éleveur.

La justice saisie

Alors la Confédération Paysanne, à l’origine de la manifestation « Salon à la ferme » a organisé cette journée pour faire le point sur la question. En décembre dernier, le syndicat a déposé un recours devant le Conseil d’Etat. Il réclame des dérogations au confinement, ou une réglementation spécifique.  Rien à voir selon lui entre une ferme à 500 poules et les usines du Nord ou du Sud Ouest à 150 000 bêtes… Cette dernière région concentre d’ailleurs 95% des cas de grippe aviaire, alors que le Vaucluse n’en a pas recensé un seul.

La haute juridiction a accepté de se saisir de la question au fond et promis une réponse pour le 1er trimestre 2022.

les poules en liberté

Des poules en liberté, un modèle plébiscité par les consommateurs et pourtant menacé ©JB 2017

Des fermes en danger

En attendant, certains éleveurs, sous le coup de mise en demeure, ont confiné leurs volailles. D’autres font de la résistance, par principe ou simplement parce que leurs installations et leur mode de travail ne le permettent pas. Certains arrêtent leur activité. 30% pourraient disparaître et avec eux, un peu de la vie des territoires et des circuits courts locaux.

Des consommateurs trompés

Mais tous les œufs vendus le sont toujours sous l’appellation « plein air », une tromperie pour les consommateurs, dénoncent les éleveurs avec colère, mais aussi les représentants des AMAP. « Si ça continue comme ça, les consommateurs n’auront plus le choix d’acheter des œufs de plein air, et d’autres produits sains » fulmine André Lopez, coordinateur d’AMAP de Provence et porte-parole du collectif « Sauve qui poule 84 ».

sauve qui poule à Pernes

Denis Perreau membre du secrétariat national de la Confédération paysanne ©JB

Des mesures inefficaces

Et le confinement n’a aucune efficacité, souligne Denis Perreau, secrétaire national de la Confédération Paysanne venu tout exprès. « Cette année, on a abattu 4,2 millions de volailles, détaille-t-il. Mais à part l’enfermement, aucune solution n’est apportée. Alors qu’on sait que 90% des cas de contamination n’ont rien à voir avec la faune sauvage. Mais ils sont liés à la densité et aux conditions d’élevage. De la naissance à la mort, les bêtes sont transportées d’un lieu à un autre. Les techniciens, les camions d’aliments, les équarrisseurs vont d’une exploitation à l’autre. Mais la réglementation ne fait aucune différence entre les petits élevages et ceux de 120 000 poules ».

Faire confiance à la nature

Pour le responsable de la Confédération, c’est un modèle industriel qui est privilégié contre un autre. « La faune sauvage serait la source de tous les dangers, poursuit Denis Perreau. Pour les volailles mais aussi les porcs, les ovins en montagne… Pourtant, dans la nature, même si des bêtes sont malades, il n’y a pas d’épidémies, mais des défenses immunitaires et un équilibre. Alors qu’à vouloir tout stériliser et empiler des bêtes par milliers, on favorise l’apparition de microbes néfastes pour les animaux. Et on peut imaginer que de prochains virus dangereux pour les humains sortiront des élevages industriels ».

Sauve qui poule fait des petits

Eleveurs, consommateurs, citoyens au sein du collectif « Sauve qui poule 84″©JB

Sauve qui poule fait des petits…

Né en 2017 avec la crise de grippe aviaire de 2016, le Collectif « Sauve qui poule 84 » compte 650 adhérents. Le collectif regroupe des éleveurs et des consommateurs, notamment au travers des AMAP (138 soutiennent les éleveurs). Il défend les élevages fermiers et réclame une réglementation spécifique pour eux. Ces deux derniers mois, 8 collectifs « Sauve qui poule » ont vu le jour, dans le Gers, la Loire-Atlantique et plus près de nous dans le Var.

Dans le Vaucluse, on compte environ 200 éleveurs de volailles. 95% d’entre eux ont moins de 1500 poules et la moyenne est à 450. 30 élevages sont en Bio. (infos Agribio84).

Le Salon à la ferme sera samedi 5 mars à la Ferme du Rouret à Mazan (84).

L’occasion de découvrir l’agriculture paysanne, auprès de celles et ceux qui la pratiquent tous les jours. Avec la visite de la ferme, les visiteurs pourront bénéficier d’une buvette, de concerts et d’animations pour les plus jeunes.

Le thème de la journée : « les semences paysannes ». De 14 à 18h, troc de plantes et de graines.

Et de 14h30 à 16h, rencontre et discussion avec Guy Kastler, cofondateur de la Confédération Paysanne et du réseau « Semences paysannes ».

Contact : confederationpaysanne84@gmail.com
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