1/ Vente en parts sociales, l’accaparement des investisseurs
Des micro-fermes péri-urbaines aux grandes exploitations, les enjeux sont différents. Si de nombreux élus affichent leur volonté de développer les premières, notamment sur les friches, la SAFER PACA, chargée de veiller aux transactions, tire la sonnette d’alarme concernant les grands domaines.
De plus en plus de terres agricoles échappent aux procédures classiques, au détriment des jeunes et des structures de taille moyenne. La question du foncier est pourtant primordiale. Et dans notre région, la pression est maximale. La concurrence de l’urbanisme et des infrastructures provoque une tension sur les prix. Le rôle de la SAFER PACA est donc vital : faciliter les cessions de terres en faveur des producteurs.
Hausse des prix
Mais aujourd’hui, un mécanisme vient contourner son intervention. Celui de la vente de parts sociales, qui échappe totalement à son droit de préemption et à toute forme de régulation… Conséquences : ce mode de transmission favorise la concentration de domaines déjà importants. Il a conduit aussi à une hausse de l’ordre de 20% du prix des parcelles.
Et le phénomène n’est pas marginal. En 2019, 10 000 hectares ont ainsi changé de propriétaires dans la région. Pendant ce temps, la SAFER PACA attribue environ 7 500 ha par an.
Concentration dans les grands domaines
Max Lefèvre, directeur général de la SAFER PACA détaille ces opérations. « Ce qu’il faut retenir, c’est que sur ces 10 000 ha, 6 300 sont des transactions familiales. Le problème se pose donc sur 3 700 ha, soit 80 opérations pour une valeur totale de 140 millions d’€. Ce qui donne un montant moyen de 175 000 € par opération. Il s’agit bien de grands domaines vendus très chers ». Le Var est principalement concerné, devant les Bouches-du-Rhône et le Vaucluse.
Changer la loi
Face à un phénomène inquiétant qui exclut les jeunes du marché, un projet de loi qui ouvrait le droit de préemption des SAFER aux cessions partielles de parts a été retoqué : inconstitutionnel ! Une loi semble pourtant indispensable. Un nouveau texte du député LREM Jean-Bernard Sempastous prévoit que le droit de préemption soit exercé par le préfet et non plus par les SAFER. Il pourrait aboutir au printemps 2021.
Toutes les cessions de parts hors cadre familial seraient soumises à l’agrément du représentant de l’Etat. « Par exemple, précise Max Lefèvre, si un investisseur acquiert à travers une cession partielle de parts une centaine d’ha et que le préfet considère que cela conduira à un agrandissement trop important de la structure d’exploitation dudit investisseur, il pourra imposer à celui-ci de libérer 30-40 ha sur les 100. Le processus de libération pourra être mis en œuvre par les SAFER qui disposent des compétences et d’une grande pratique en la matière ».
Enjeu économique, social et environnemental
L’enjeu est crucial pour les exploitations moyennes. Selon le directeur de la SAFER PACA, si on ne régule pas ce marché des parts de société, « de grands groupes vont s’accaparer la majorité des terres et les rendre inaccessibles, par les prix pratiqués, aux exploitations de taille moyenne ou à l’installation de jeunes sur des cultures céréalières ou légumières ».
Autre revendication, la reconnaissance du foncier comme un bien rare, à l’image de l’eau ou des forêts, dans les documents d’urbanisme. Pour la SAFER PACA, l’équilibre économique agricole est menacé et la vitalité des territoires en jeu.
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Pour aller plus loin
Open Friche Map:
La SAFER PACA a mis au point une carte interactive. Cette application s’adresse aussi bien au monde agricole qu’au grand public. Objectif ? Recenser collectivement les friches. Et par là participer à la revitalisation de l’espace rural.