Parc Natura‘Lub… Ca sonne nature et Luberon, patrimoine et préservation… il s’agit pourtant d’une ZAC, Zone d’Aménagement Concertée. Et qui dit aménagement dit artificialisation des sols. Une question devenue polémique, à Cavaillon comme partout.
A l’heure cruelle d’une canicule inédite, symptôme d’un changement climatique reconnu unanimement par les scientifiques – mais hélas pas encore par les politiques -, à l’heure de la perte irréversible de la biodiversité, tout nouveau projet d’aménagement se doit d’apparaître vert et vertueux. C’est le cas de la ZAC Natura’Lub. Mais les déclarations d’intention suffisent-elles ?
A Cavaillon, certains en doutent, malgré les arguments des élus de la Communauté d’agglomération Luberon Monts de Vaucluse et de la Préfecture du Vaucluse. Le projet est vieux de plusieurs années, et a beaucoup changé. Mais la question est toujours la même. Celle de l’aménagement des bords de la Durance à Cavaillon. Aujourd’hui prévu sur 35 hectares, et 100 ha à terme.
Aménagement vert ?
Pour les élus, ce projet est porteur d’activités économiques, d’installation d’entreprises et donc de créations d’emplois. 1600 sont visés, « sur des segments d’activités de production innovants et durables », peut-on lire sur le site de la Communauté de communes. Un projet « dédié à la naturalité », avec des entreprises vertes, une gestion durable et des énergies renouvelables à l’ordre du jour.
Perte de terres fertiles ?
Pour les écologistes et le syndicat agricole Confédération Paysanne, le projet de la ZAC des Hauts-Banquets va à l’encontre des priorités environnementales. Artificialisation, béton, camions… Le tout sur des terres agricoles fertiles et irriguées, de surcroît ! Dans un département où le foncier agricole manque cruellement aux nouveaux agriculteurs. Bref, à leurs yeux, un beau gâchis, à la veille de la loi d’orientation foncière sensée mettre fin à l’artificialisation « nette » des terres agricoles. (voir ci-dessous).
Dans un récent communiqué de presse, la « Conf. » souligne pour s’en indigner que « pour 600 m2 de jardin pédagogique prévus, 200 000 m2 de base logistique seront bâtis. » Et le syndicat s’interroge : « le besoin de tant de stockage est-il réel? Il existe des hangars vides à réutiliser au MIN
et des terres sèches de moindre valeur agronomique ». Le syndicat agricole fait remarquer que d’autres zones d’activité ne trouvent pas preneur et restent en déshérence, au prix du sacrifice de terres agricoles.
Béton ou végétation ?
Mais le projet suit son cours, nanti de toutes les études, autorisations et concertations légales et réglementaires nécessaires, arguent les élus. Qui mettent en avant le fait que les terres en question n’étaient pas en culture.
En mai dernier, une manifestation était organisée sur le site, contre le projet. La Confédération Paysanne demande son abandon pur et simple et la mise en place d’une vraie politique de transition écologique. Elle affirme la nécessité de ceintures vertes autour des villes, pour assurer leur alimentation mais aussi lutter contre le réchauffement climatique. Pour sa part, Foll’Avoine dénonce un projet incohérent avec les déclarations d’intention des élus qui souhaitent « sanctuariser les terres irriguées ». L’association a déposé un recours auprès du Préfet.
Pour aller plus loin
Extrait du discours du Président de la République au salon de l’Agriculture 2019
« … la France, pour ne parler que d’elle, a perdu un quart de sa surface agricole sur les 50 dernières années. Pour y remédier, nous avons fait ce choix radical avec le gouvernement de viser le « zéro artificialisation nette » et donc, nous sommes en train de voir comment tenir cet engagement en particulier dans nos politiques d’urbanisme. C’est un véritable défi parce qu’il vient à rebours de tout ce que nous avons fait depuis des décennies ou si nous regardons l’évolution de nos villes ou plus exactement des périphéries de nos villes, nos villages, nous n’avons cessé de grignoter les terres agricoles pour ouvrir des zones commerciales, des zones industrielles et des zones de logistiques. Il faut rompre avec cette pratique et là aussi, le combat agricole est pleinement réconcilié avec le combat écologique parce que cette extension progressive est mauvaise sur le plan environnemental et donc le zéro artificialisation nette, c’est un vrai changement de l’organisation de notre urbanisme et de nos pratiques. »